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lundi 14 mars 2022

Pour citer ce texte : HÉTIER, R.. (2022). Pour une éducation profonde en anthropocène Annuel de la Recherche en Philosophie de l’Education , 2
[https://www.sofphied.org/annuel-de-la-recherche-en-philosophie-de-l-education/arphe-2021/dossier-partie-2-ecole-et-anthropocene/article/pour-une-education-profonde-en-anthropocene]

Pour une éducation profonde en anthropocène 

 

Renaud Hétier 
UCO, Angers ; CREN, Nantes ; LISEC 

 

Résumé : La catastrophe qui s’annonce avec l’Anthropocène réclame une grande révision de nos objectifs éducatifs. Il importe de réenraciner les enfants dans la Terre, de les rendre sensible au vivant, pour en faire les défenseurs incarnés. Ainsi, la propension humaine à l’illimitation, excitée par la société de consommation, pourrait être contrecarrée par un certain sentiment de satiété et de quiétude à simplement être. Pour autant, il faut aussi faire avec cette disposition proprement humaine qui est celle du dépassement. La créativité, encouragée dès l’enfance, peut ainsi permettre une forme de transcendance de l’illimitation. 

Mots-clés 
Anthropocène, éducation profonde, sensible, créativité 

 

Abstract : The upcoming catastrophe of the Anthropocene calls for a major overhaul of our educational objectives. It is important to root children into the Earth once more, to make them aware of the living, to make them its incarnate defenders. Thus, the human inclination to unlimitedness, stimulated by the consumer society, could be counteracted by a certain feeling of fullness and tranquility in simply being. However, it is also necessary to deal with this properly human disposition which is that of surpassing oneself. Creativity, encouraged from childhood, can therefore allow a form of transcendence of unlimitedness. 

Keywords 
Anthropocene, deep education, sensitive, creativity 

 

Introduction 

 

La situation environnementale sur Terre est à ce point dégradée que la question se pose d’actions urgentes, et notamment d’une lutte à la fois individuelle et politique. Dans ce contexte, la place de l’éducation est délicate. Elle prend du temps, et ne peut être précipitée ni court-circuitée sans dommages. Deux ordres de questions se présentent : faut-il informer et former les enfants aux enjeux de l’Anthropocène dès le plus jeune âge ?  Et faut-il pousser les adolescents à entrer dans la lutte politique, voire les émanciper plus tôt à cette fin ? Le parti-pris de cette réflexion est de considérer la nécessité, même dans l’urgence, d’investir fortement l’éducation. Il ne s’agit pas de nier l’urgence, mais de penser qu’il va de toute façon aussi falloir vivre avec des effondrements inéluctables, et que les changements humains radicaux que cela implique ne peuvent passer que par une éducation « profonde ». Par ce terme nous désignons une éducation précoce, sensible, impliquant le psychisme et la relation et investissant la créativité. Cette éducation est profonde à la mesure de l’imaginaire et de la sensibilité qu’elle forme, de façon antérieure et plus enracinée que ne peut l’être une éducation seulement rationnelle. Il s’agira ainsi, d’abord, d’articuler une sensibilisation à la vie, à l’altérité et à la vulnérabilité. Ensuite, il s’agira de se confronter à une donnée psychologique incontournable : la propension humaine à l’illimitation, et à la nécessité d’une éducation qui fasse avec autant qu’elle doive aussi faire contre. Cela nous conduira enfin à proposer des alternatives à une illimitation destructrice. La créativité prendra alors toute son importance.  

 

Sensibilisation à la vie, à l’altérité et à la vulnérabilité 

 

L’idée que l’apprentissage fondamental est celui de la vie est aussi ancien, sans doute, que l’humanité. Il s’agit surtout d’apprendre à vivre, c’est-à-dire à savoir comment mener une vie humaine, qui est indissociable, jusqu’au 18e siècle et notamment jusqu’à Rousseau, d’une vie sociale. La distinction entre l’homme et le citoyen, en éducation, tient à ce philosophe. Celui-ci s’attache à défendre non seulement la vie de l’enfant, mais précisément la possibilité de sentir sa vie. Ainsi, écrit-il à propos du jeune enfant : « il s’agit moins de l’empêcher de mourir que de le faire vivre. Vivre, ce n’est pas respirer, c’est agir ; c’est faire l’usage de nos organes, de nos sens, de nos facultés, de toutes les parties de nous-mêmes, qui nous donnent le sentiment de notre existence. » (Rousseau, 1966, 43, nos italiques)  

 

Aujourd’hui, nous savons à quel point il est important de se sentir vivant, ce qui n’est pas toujours facile pour les adolescents (Braconnier, 2009). Or, si on s’intéresse aux programmes scolaires, on s’aperçoit qu’il y s’agit surtout d’une rationalisation de la vie, du point de vue biologique. Les questions existentielles peuvent être abordées, mais plutôt dans le cadre d’activités telle que la discussion à visée philosophique, ou dans l’approche de la littérature. Dans ce contexte, la vie peut être pensée (en tant que phénomène biologique, en tant que phénomène existentiel), mais rien ne dit qu’on en facilite et renforce le sentiment. Un objectif adapté aux enjeux de l’Anthropocène serait alors de permettre aux enfants de faire des expériences sensibles et contemplatives pour elles-mêmes, qui permettent à la fois de s’éprouver soi-même comme sensible, capable d’être touché par les manifestations du monde et particulièrement celles de la vie, et de découvrir qu’un certain nombre d’objets du monde, et notamment les êtres vivants, peuvent être « résonnants » (Rosa, 2018, 2020). L’enjeu d’une telle sensibilisation est considérable, si on convient, avec Jacques Tassin, que  

 

le vivant que nos enfants aperçoivent dans leur champ visuel et entendent de leurs propres oreilles ne leur parle plus. Aussi passent-ils leur chemin. Devenus adultes, comment ces enfants peuvent-ils être amenés à protéger ce qui n’a même pas retenu leur attention ? Nous ne pouvons protéger que ce que nous connaissons (Tassin, 2020, 162, nos italiques).  

 

Une telle perspective n’est pas sans souligner le lien entre attention et écologie (au sens d’un milieu dans lequel l’attention prend sens) (Citton, 2015). 

 

L’idée de la sensibilisation est à penser antérieurement à celle de la connaissance (et celle de la rationalité), dans la mesure où non seulement la petite enfance s’y prête, du fait d’une prédominance des sens sur le langage et sur la cognition, mais aussi parce que nous sommes fondamentalement des animaux, des êtres eux-mêmes vivants. C’est dans une sorte d’oubli de cette condition première que nous pensons l’environnement plutôt que le milieu (Berque, 2014, Debray, 2020), que nous préférons parler de biodiversité plutôt que du vivant (Tassin, 2020, 43, 156). Or, il y a une réciprocité entre vivants, et même sans doute au-delà, entre le monde et le vivant, comme a pu l’avancer Merleau-Ponty, pour qui la couleur venait à la rencontre de l’œil, allant jusqu’à évoquer un « accouplement de notre corps avec les choses » (1945, p. 376). La rencontre du monde, de la vie du monde révèle et stimule le sentiment d’être soi-même vivant, et de faire partie d’un tout. Le « vivant » est ainsi constitué de tous les organismes de la biosphère, qui sont à la fois en interaction et en interdépendance (depuis les bactéries et les champignons aux baleines et aux humains), mais aussi tout ce qui passe par les organismes vivants (l’air, les minéraux, etc.). Sentir la présence de ce vivant est particulièrement important à l’heure où nos vies deviennent abstraites et distantes, et où nous avons un accès privilégié aux images des choses, parfois au détriment d’un contact avec elles, contact qui nous communique quelque chose (Abram, 2013). Cette réciprocité est ce qui permet de s’intégrer dans le tissu du vivant, d’en penser l’unité et les interdépendances, bref, de pleinement intérioriser le sentiment du vivant. Tassin cite le philosophe Christian Godin, pour qui le corps n’est pas : « cette forteresse entourée de peau, où l’homme actuel voit l’incarnation unique de son moi […], mais un nœud de relations qui vont jusqu’à la mer et atteignent jusqu’au ciel. » (Tassin, 2020, p.67, Godin, 2012, p. 96).  

 

Pour ce qui concerne les enfants, il s’agit prioritairement de « les amener à voir, sentir, écouter, toucher, goûter » (Tassin 2020, p 171), en accédant autant que possible à « la part sauvage du monde » (Maris, 2018). 

 

D’un certain point de vue, intégrer une relation à l’altérité pourrait sembler en partie redondant par rapport ce qui vient d’être dit sur la vie. Or, un certain déplacement peut être opéré. Nous avons insisté, plus haut, sur la réciprocité du sentiment de vie (je me sens vivant comme je sens le monde vivant). Dans la sensibilisation à l’altérité, il y a quelque chose qui peut précisément déborder le sujet, voire le transcender (Briançon, 2012). On sait que le bébé part d’une situation de fusion et de confusion dans laquelle il ne distingue d’abord pas son corps d’un objet extérieur (comme le sein maternel). Mais très rapidement, s’ouvre un espace potentiel (Winnicott, 1975) qui permet d’être seul en présence de quelqu’un d’autre, d’explorer et de manipuler ses propres objets. Une relation à des objets alters devient possible et s’épanouit par la suite, comme le précise Winnicott, dans l’aventure culturelle. Mais on pourrait dire que le sujet se projette et se prolonge dans la culture, alors que le rapport au monde et à la nature lui renvoie quelque chose qui lui reste fondamentalement étranger. De ce fait, le rapport à l’altérité est marqué par une ambivalence : angoisse devant les éléments qui se déchaînent, devant l’animal menaçant, devant l’infini, mais aussi émerveillement (la grandeur d’un horizon, la beauté de l’animal sauvage et « libre », le flux d’un ruisseau d’eau claire). Il nous est devenu impossible de survivre nus dans la nature sauvage, et nous ne pouvons pas nous y projeter, mais nous pouvons sentir cependant que cette nature et au-delà, ce monde étranger, nous englobent et nous parlent. 

 

L’éducation telle qu’elle se fait est plus volontiers « politique », au sens où c’est la figure d’autrui, comme mon alter-ego, qui s’impose. Il s’agit essentiellement d’apprendre à vivre en société, et l’idée d’une citoyenneté se lie à celle d’une acceptation de la différence, qu’elle soit liée à la culture, au handicap ou autre chose. Mais en se concentrant ainsi sur l’inter-humain, on tourne le dos à une communauté plus vaste, qui est celle des autres vivants. Un débat a lieu, bien évidemment, sur l’anti-spécisme et sur la perspective par laquelle toute espèce aurait le même droit de vivre, ce qui réduirait très fortement la marge de l’omnivore qu’est l’humain. Mais il y a sans doute un moyen terme entre une idée d’égalité parfaite, qui peut d’ailleurs être étendue à toute forme d’entité (comme dans la reconnaissance de droits pour une rivière), et l’exploitation industrielle, génératrice de souffrance, qui prévaut actuellement (Pelluchon, 2015). L’enjeu est, en un temps où le sens du sacré s’est perdu en raison des multiples manières par lesquelles nous intervenons sur la matière pour la maîtriser, de savoir se redisposer vis-à-vis d’une altérité qui n’est plus ni magique ni mystérieuse, sans doute, mais qui peut encore être « merveilleuse » (Vergely, 2010). Il y a quelque chose à comprendre dans l’histoire des hommes et des cultures, qui a aussi rendu possibles des pratiques extrêmement soucieuses de l’environnement et des prélèvements opérés dans la nature par les peuples premiers. 

 

Du point de vue éducatif, « nous entretenons, écrit Tassin, à force de raison, à défaut d’avoir préservé notre dimension sensible, une névrose universelle consistant à quantifier, comptabiliser, numériser, accumuler et, au bout du compte, anéantir. » (Tassin, 2020, p.16). À notre sens, sortir de cette rationalité passe aussi par une capacité à l’émerveillement. Cela suppose qu’on n’oppose pas penser et s’émerveiller. Au contraire, on peut comprendre l’émerveillement comme une manière de penser ce qui dépasse la pensée (au sens d’une maîtrise, comme une puissance de l’attention (Hétier, 2020)). « Seul l’émerveillement permet d’embrasser la puissance que rien ne peut embrasser » écrit ainsi Maxime le Confesseur (cité par Vergely, 2010, 183). Nous avons pu décrire ailleurs l’« émerveillement en tant qu’expérience d’une manière – accueillante – de penser qui déborde ce qu’on peut (accepter de) penser ordinairement, manière de penser l’impensable (un impensable qui mérite d’être considéré et accueilli), manière de faire une expérience particulière de pensée, et ainsi d’accroître l’empan de ses expériences » (Hétier, 2020). Il y a ainsi devant l’immensité du monde, devant la sauvagerie des éléments, devant l’incroyable foisonnement de la vie, un émerveillement qu’il importe de stimuler, par des expériences sensibles, dès la petite enfance, et de ne cesser ensuite de cultiver en tant que tel, ce qui suppose des moments de contemplation gratuite. Et parallèlement, le rapport au merveilleux peut aussi être cultivé à travers des expériences culturelles comme celles qui cultivent précisément le merveilleux. L’émerveillement ne tient pas qu’à la force et à la grandeur, il tient aussi au tout petit et au vulnérable qui vivent quand même. 

 

Les théoriciennes du care attirent fortement notre attention sur la vulnérabilité. Mais avant même d’évoquer cette vulnérabilité, on peut relever un souci du sensible chez un auteur comme Nussbaum. Donatelli note ainsi chez elle « le besoin anti-rationaliste de fonder une […] connaissance de la vie humaine dans l’expérience ordinaire et particulière (affective, intellectuelle, imaginative, historique) » (Donatelli, 2014, 161). Tronto, propose, dans Un monde vulnérable, avec Berenice Fischer, une définition des activités de care dans le souci global de « maintenir, perpétuer et réparer notre « monde », en sorte que nous puissions y vivre aussi bien que possible » (Tronto, 2009, 143). Et l’auteur précise aussitôt après que cette définition : 

 

ne se limite pas aux interactions que les humains ont avec les autres. Nous y incluons la possibilité que le soin s’applique non seulement aux autres, mais aussi à des objets et à l’environnement (Tronto, 2009, pp.143-144).  

 

Et plus loin : « les dispensateurs de soin apportent un soutien essentiel à la vie » (Tronto, 2009, p.260).  Certes, « tous les humains ont besoin d’être l’objet d’attention » (Tronto, 2009, p. 253), et ceci sans doute en un sens profond de l’attention du fait de la sensibilité et de la complexité humaine, mais finalement toute forme d’existence suppose en arrière-plan une activité de soin : l’animal qu’il faut nourrir, l’arbre qu’il faut tailler, l’instrument de musique qu’il faut accorder, etc. On pourrait évidemment considérer que « la part sauvage du monde » (Marris, 2018) est exclue de ce type d’activités. Or, précisément, l’ampleur et l’impact des activités humaines font que plus rien n’y échappe. On peut reprendre les mots de Liane Mozère dans son avant-propos à Un monde vulnérable :  

 

on ne se soucie pas de l’autre ou d’un corps parce qu’il a un problème ou parce qu’il est un problème. Il est nécessaire que de la sollicitude lui soit prodiguée, car autrement cet autre ou ce corps ne peuvent persévérer dans leur être ; ils sont détruits. (Mozère dans Tronto, 2009, p.7). 

 

Les enfants sont dans une position particulière du point de vue de la vulnérabilité. D’abord incapables de survivre seuls, il va leur falloir des années avant de pouvoir prendre en charge l’intégralité de leurs besoins (ce qui n’empêchera pas de continuer d’avoir besoin, humainement, des autres). L’évolution historique de la condition enfantine (Renaut, 2002) pose problème à plusieurs égards. D’abord, une certaine surprotection de l’enfant, et une tendance à vouloir satisfaire, anticiper même, tous ses désirs, est de nature à empêcher celui-ci de sentir sa propre fragilité et sa propre dépendance. Rousseau insistait précisément, dans son Émile, sur cet aspect des choses : plutôt que d’user d’autorité, faire jouer sa force naturelle. L’essentiel étant que l’enfant « sente sa faiblesse » (Rousseau, 1966, 100). Ensuite, le souci d’adapter le milieu à l’enfant le confronte volontiers à des objets « incassables » (notamment en plastique). Et comme ce qui lui est proposé est produit de façon industrielle, ce qui est cassé peut être remplacé comme si cela était inaltérable. Enfin, l’appauvrissement des expériences de la nature et du vivant, sur lequel nous avons vu que Jacques Tassin insistait, ne facilite pas non plus le ressenti d’une vie vulnérable. Dans cette dernière perspective, toutes les actions qui peuvent être menées qui permettent aux enfants de prendre soin sérieusement (c’est-à-dire au risque de la perte de l’objet) d’objets vulnérables, et notamment d’êtres vivants, sont de nature à les sensibiliser à la vulnérabilité. 

 

L’illimitation, faire contre, faire avec

 

En tant qu’espèce, l’humanité est bien confrontée à une indétermination de ses possibilités. La dimension ouverte de l’expérience individuelle et l’exploration culturelle est frappante chez l’espace humaine. Le constat célèbre de Rousseau renvoie bien à cette « liberté » humaine :  

 

la nature commande à tout animal, et la bête obéit. L’homme éprouve la même impression, mais il se reconnaît libre d’acquiescer, ou de résister ; et c’est surtout dans la conscience de cette liberté que se montre la spiritualité de son âme (…)  (Rousseau, 1996, p. 87).  

 

De tout temps sans doute, pour s’extraire d’une condition animale originelle, les humains ont dû faire des expériences inédites, et il faut imaginer tous les échecs qu’il a fallu essuyer pour quelques réussites… Assez tôt, les humains se sont affranchis de ce qui est expressément strictement « utile ». On peut penser évidemment au sacré, et au sentiment d’obligation qui l’accompagne. Mais si on prend l’exemple des contes, qui étaient bien partagés en tant que fictions (Schaeffer, 1999), nous avons l’exemple d’un développement gratuit de l’intelligence et de l’imagination humaines. 

 

Indéniablement, la gratuité n’est plus la valeur dominante de notre époque. Que s’est-il passé entre temps ? Il n’est pas aisé de le discerner, et il ne s’agit ici que de faire des hypothèses. On peut sans doute envisager à la fois un potentiel propre à l’individu humain, et une évolution de la configuration culturelle qui lui donne place. Arnsperger et Bourg évoquent un « potentiel anthropologique d’illimitation » (Arnsperger et Bourg, 2017, 111). Ces auteurs relèvent bien la dimension actuelle et problématique de ce potentiel, et invitent à sa sublimation. Pour eux, il ne s’agit pas de  

 

le déraciner ou [de] l’annihiler, car les tentatives en ce sens échouent, tant elles semblent aller à l’encontre d’une poussée vers l’illimité profondément ancrée dans l’humain ; mais plutôt pour orienter ce potentiel d’illimitation vers des domaines de l’existence – qualifiés vaguement de « relationnels » ou « spirituels » - où l’absence de limite sert la liberté authentique au lieu de lui faire obstacle et où, paradoxalement, l’autolimitation matérielle rend possible une illimitation d’un autre ordre (Arnsperger et Bourg, 2017, 111).  

 

Il nous semble nécessaire de compléter cette perspective en évoquant, d’abord, la possibilité du geste créatif, nous y reviendrons dans notre dernière partie. Mais aussi bien considérer que pendant longtemps, les créateurs pouvaient certes être rétribués, et leurs œuvres partagées, ceci en dehors de toute dimension strictement commerciale. 

 

La question de l’illimitation touche particulièrement fortement l’enfance. Le premier a l’avoir pensé comme tel est Rousseau. Ce que décrit Rousseau dans son Émile, c’est surtout l’enfant-roi de son époque. Le philosophe met en scène le mécanisme de surenchère qu’engage la satisfaction du désir de l’enfant : « d’abord il voudra la canne que vous tenez ; bientôt il voudra votre montre ; ensuite il voudra l’oiseau qui vole ; il voudra l’étoile qu’il voit briller ; il voudra tout ce qu’il verra : à moins d’être Dieu, comment le contenterez-vous ? » (Rousseau, 1966, p.103). 

 

Il y aurait donc une solution éducative à l’inflation du désir. Mais cela est mal formulé : il y aurait une solution éducative à ce qu’une mauvaise éducation provoque, à savoir l’inflation du désir. Si on suit Rousseau, ce n’est donc pas tant dans la nature qu’émerge ce désir insatiable, que dans nos pratiques sociales. Il s’agit donc de faire en sorte non pas tant de contrer ce désir, mais de tout faire pour ne pas le faire naître. De ce point de vue, on peut se demander si Francis Imbert a raison de parler de « pente naturelle de l’enfant » quand il évoque :  

 

cette pratique pédagogique, étrangère à une action directe de l’éducateur sur l’éduqué, [qui] vise la constitution de systèmes de médiations à travers lesquels pourra s’opérer la transformation de cette pente « naturelle » de l’enfant qui le conduit aux désirs illimités et à la toute-puissance imaginaire. La finalité de l’éducation se situe alors dans l’apprentissage d’un pouvoir « limité, mais réel » (Imbert, 1989, 84). Cela implique d’en passer par l’épreuve de la frustration, ou encore, pour l’éducateur, de pouvoir dire « non à une certaine régression pour dire oui à tout le reste1  (Imbert, 1989, 84). 

 

En fait, il y a à envisager deux cas de figure. Dans l’Émile, il ne s’agit pas seulement d’Émile. Il est aussi question d’autres enfants. Et cela n’est pas sans signification. Émile représente l’enfant éduqué dans la stricte prise en charge de ses besoins, jamais de sa « fantaisie » (ses désirs). Les autres enfants n’ont pas eu cette chance, et ils sont volontiers tyranniques, effectivement « tout-puissants », tels que la psychanalyse les décrirait aujourd’hui (Hétier, 2013). Dans les fictions que Rousseau introduit dans son ouvrage, la situation n’est pas la même s’il s’agit ou non d’un enfant bien éduqué. Face à un enfant déjà « gâté » par son éducation, il s’agit de confronter celui-ci, après certes un temps de « laisser-faire », à une limite extrêmement forte. Dans le cas de l’enfant qui brise ses vitres et de celui qui réveille malicieusement son précepteur en pleine nuit, l’enfant va se trouver enfermé, et ainsi complètement arrêté dans ses débordements. Dans le cas bien différent de l’enfant qui ne sait ni ne veut courir, il s’agit de faire l’expérience de la perte et du manque. Dans le cas d’Émile, l’épisode du jardin de Robert, celui des gobelets2 , celui enfin de la promenade en forêt, il s’agit plutôt de « laisser faire », d’aller jusqu’au bout d’une expérience : prendre conscience de la propriété (dans les deux premiers cas), sonder l’intérêt du savoir. Mais finalement même Émile a besoin de se confronter à des limites, celle d’une perte : ne pas empiéter sur la propriété d’autrui relève bien de cette dynamique. L’éducation, même en passant par des médiations, en faisant jouer des tiers (comme le jardinier Robert) doit bien faire contre un élan d’abord illimité de l’enfant : « c’est une disposition naturelle à l’homme de regarder comme sien tout ce qui est en son pouvoir », écrit ainsi Rousseau (1966, 103). 

 

Cependant, il ne s’agit pas seulement de faire contre, il s’agit aussi de faire avec. Une fois que des limites ont été identifiées, et si possible intériorisées, l’enfant doit pouvoir retrouver un espace d’action. Le risque d’une éducation autoritaire rejoint en effet celui d’un laisser-aller : c’est l’impuissance3 . Pour reprendre la formulation de Francis Imbert, il s’agit que l’enfant « puisse expérimenter son pouvoir, se rendre compte par lui-même de la distinction du « possible et de l’« impossible » » (Imbert, 1989, 83). Cultiver, à l’intérieur de limites effectivement rencontrées, son pouvoir d’action est essentiel. C’est notamment au premier plan dans l’épisode du jardinier Robert : une fois qu’Émile s’est cruellement heurté à la réalité de la propriété (puisque Robert a retourné les fèves qu’Émile et Jean-Jacques avaient plantées et cultivées), une négociation a lieu qui permet de reprendre une culture moyennant une participation. Le pouvoir d’action de l’enfant est bien préservé, même s’il est limité. L’enfant est un acteur ; il peut aussi être un auteur. 

 

Pour un accomplissement non destructeur

 

L’idée de créativité ne doit pas être réduite à la seule création artistique. Une interprétation ainsi restrictive serait hautement problématique : au moment où le monde s’effondre, ne s’en remettre qu’à l’art pourrait être une forme d’aveuglement, de politique de l’autruche. C’est plus profondément qu’il s’agit de « descendre ». Deux verbes peuvent nous guider sur ce chemin : faire et être. Cela nous mènera ensuite à une réflexion sur la créativité comme manière d’être, pourvu qu’elle soit nourrie et stimulée. 

 

Winnicott précise bien que pour sortir de ce qu’il appelle le « contrôle magique » (c’est-à-dire la pensée abandonnée à elle-même, et les fantasmes qui vont avec), « on doit faire des choses, et non seulement penser ou désirer, et faire des choses, cela prend du temps. Jouer, c’est faire » (Winnicott, 1975, p. 59). Nous retrouvons ici une idée déjà étudiée avec Rousseau et Imbert, celle de rendre possible un certain pouvoir d’action, « limité, mais réel ». Du point de vue psychique, agir c’est déjà se confronter à des limites, celles de ses forces, de ses possibilités, celle d’un « quelque chose » du réel, alors que par ailleurs on peut tout imaginer. Dans cette perspective, il importe de se préoccuper des espaces que nous laissons aux enfants. Et il est à craindre qu’une éducation telle qu’elle se fait majoritairement à l’école, qui vise surtout la tête, ne contribue pas suffisamment à la rencontre du réel.  

 

Quant à la possibilité de faire – et pas seulement de mentaliser –, on peut se demander quel rôle joue les dispositifs numériques. On sait que les enfants, et plus encore les adolescents passent aujourd’hui une part substantielle de leur temps libre dans des univers virtuels tels que les jeux vidéo (Desmurget, 2019, Spitzer, 2019, Lebrun, 2020). D’un certain point de vue, la virtualisation de l’action dans des jeux vient confirmer l’impuissance constatée par ailleurs. Le temps passé sur les écrans est autant de temps en moins sur tel ou tel terrain, dans tel ou tel milieu de vie, et dans la Cité. Mais on peut aussi constater que dans les jeux vidéo, il est surtout question d’action (bien plus que de narration, d’exploration ou de contemplation). Il y a chez les enfants et les adolescents quelque chose comme un désir d’action et un plaisir de l’action à défaut d’un pouvoir d’action.  

 

Qu’en est-il, à présent, de la possibilité d’être ? On peut revenir à Winnicott : « After being, doing and being done too. But first being. » (Après être, faire et accepter qu’on agisse sur vous. Mais d’abord être.) (Winnicott, 1975, 118). Du point de vue psychanalytique, pour pouvoir être et disposer d’un « sentiment du soi » (ibid.), il faut d’abord avoir été pour quelqu’un d’autre, quelqu’un d’aimant, quelqu’un capable de se réjouir de notre seule existence, indépendamment de toute action particulière, indépendamment même d’une relation. L’enjeu est essentiel : pouvoir se contenter d’être est aussi ce qui permet d’être tel qu’on est et tel qu’on devient, plutôt que tel que semble le désirer autrui. Autrement dit, la créativité est aussi de mise, en tant que faculté à s’inventer sans crainte et sans calcul. Se donner la possibilité d’être tel qu’on est, mais aussi de changer et de se renouveler peut ainsi être libérée. Il ne s’agit pas de jouer des rôles (ce qui peut se faire dans une activité artistique par ailleurs), mais de continuer d’inventer sa vie en s’autorisant à faire des choix de changements. Que l’enfant, notamment, n’ait pas à trop répondre du désir de ses parents, et spécifiquement d’un désir de réussite scolaire et sociale, est ce qui doit lui permettre d’être ce qu’il peut être. De façon classique, dans le domaine spirituel, « être » s’oppose aussi à « avoir ». On peut considérer que la satisfaction, du côté de l’ « avoir » est soumise à la surenchère du désir évoqué plus haut : consommatrice, destructrice, et en même temps décevante. Permettre au sujet de se sentir être et pouvoir devenir est alors ouvrir à des satisfactions qui n’ont pas à être cherchées massivement du côté de l’« avoir ».  

 

Pouvoir être – avant de faire, même sans « avoir » – c’est développer une « puissance »/« potentia ». Cette puissance est d’abord sensible : elle est primitivement éprouvée par son corps, dès les premiers cris, les premières manipulations, la première motricité. Dès lors, on ne doit pas être étonné par la sensibilité d’une puissance à d’autres puissances : celle des éléments, celle des animaux, celle d’autrui. C’est pourquoi, avant qu’une haute exigence spirituelle mène le cas échéant à ne plus rien faire d’autre qu’être, il importe, dans l’enfance, de pouvoir faire (quelque chose). On a vu plus haut que faire permettait d’entrer dans la réalité (en sortant du « contrôle magique »), c’est aussi ce qui permet de s’éprouver comme puissance vitale, comme capable d’agir sur la matière, capable d’interagir avec toute autre forme de vie. Ainsi, le vivant reconnaît le vivant comme puissance sensible : mouvement, chaleur, expression. En suivant Merleau-Ponty, il y a expression et sensation mutuelles entre un sujet et le monde. Sentir la vie qui anime un vivant, c’est sentir par résonance la vie en soi. Et c’est la force de ce sentiment d’existence qui peut être une « richesse » qui ne réclame d’en passer ni par la possession ni par l’accumulation. En ce sens, une expérience précoce, sensible, fréquente, immersive de la nature peut contribuer à ce sentiment. Il ne s’agit pas pour autant de promouvoir une (impossible) fusion avec la nature. Comme l’écrit Emanuele Coccia, un récepteur « n’est que la capacité de n’être pas ce qu’il est capable de recevoir » (Coccia, 2013, 52).  

 

Pouvoir être, pouvoir devenir (de façon ouverte et créative), se sentir exister, notamment au contact de la nature et du vivant ne renvoie pas à la seule « immersion » écologique. Notre rapport à toutes choses est toujours un rapport culturel, tissé de langage, de représentations, de configurations héritées. Notre rapport au vivant s’inscrit dans un rapport historique et anthropologique au monde. L’aventure culturelle, pour reprendre l’idée de Winnicott, prolonge le jeu créatif enfantin. Dans le cadre de la présente réflexion, il ne s’agit pas de savoir ce qui peut contribuer au développement de la créativité seulement, mais de savoir comment cette créativité peut contribuer à une transformation profonde du rapport du sujet au monde. Dans cette direction, il importe que le sujet, dès la petite enfance, soit confronté à une multitude d’objets par lesquels il peut aussi sentir le monde tel qu’il est senti et pensé par d’autres, et former ainsi à la fois sa sensibilité, sa capacité de penser et sa propre capacité d’expression. Les enjeux qui s’ensuivent sont multiples : capacité à se sentir exister du fait même de sa sensibilité (avant même de faire, sans besoin d’avoir), capacité à investir le développement de sa sensibilité et de sa pensée pour donner forme à son expérience du monde (et ainsi ne pas dépendre excessivement de l’opinion), capacité à créer des objets (et s’extraire ainsi du seul rapport de consommation aux objets). 

 

Cette aventure culturelle ne vise pas d’abord, dans la perspective d’une éducation profonde, un savoir, mais une créativité nourrie. La créativité est à comprendre comme un jeu avec ce qui existe déjà : une forme, une matière, des objets, des mots, des œuvres. « Il est impossible d’être original sans s’appuyer sur la tradition » selon la formule de Winnicott (1975, 138). En éducation, cela implique des médiations culturelles intensives et réitérées. On rejoint ici Bruno Duborgel quand il assigne à l’école la fonction de « Musée imaginaire », c’est-à-dire d’un « merveilleux et anthropologique répertoire des symboles – tant iconographiques ou rituels que mythologiques ou poétiques » (Duborgel, 1992, pp ; 239 et suiv.). L’auteur insiste d’ailleurs sur l’idée de nourrissage. Il évoque ainsi « une pédagogie du « plein », c’est-à-dire qu’elle est débordante d’objets, d’images et d’icônes, de mythes, de légendes et de contes, de poèmes à la consommation, à la délectation, à la méditation et à la production desquels elle veut entraîner tout au long de la scolarité, de la Maternelle à l’Université » (Duborgel, 1992, 241). Pour nous, cet espace de nourrissage doit s’articuler avec deux autres espaces. Un espace de métabolisation, où il s’agit de se « servir » de ce qu’on reçoit de façon pratique et/ou créative, par toutes formes d’interprétations, de collages, de détournements, etc. (plutôt que par restitution stricte/« scolaire »). Un espace d’« importation », où les différents investissements des enfants et des adolescents (activités, communication, partage, etc.) puissent être accueillis, repartagés, reconnus, valorisés. Le vivant est aussi là, dans la vie de la jeunesse, qui n’est pas réductible à la seule position d’élève recevant des savoirs que l’école transmet. Il s’agit, dans différents espaces, de favoriser le sentiment d’existence. 

 

L’école est a priori le lieu même de ce nourrissage culturel stimulant créativité et imagination. Cependant, cela suppose une réorientation importante, tant l’école peut être réduite à l’institution d’une certaine rationalité contre les pouvoirs de l’imagination. Cette rationalité est à comprendre comme s’exerçant à la fois comme déconstruction analytique et comme instrumentalisation. L’analyse, outre qu’elle prend du temps, du temps qui n’est du coup pas consacré à la transmission et à la créativité, défait un certain rapport, de libre réception, d’une résonance singulière de l’objet culturel. De plus, la pression constante de l’évaluation contribue à nuire à la gratuité qui devrait prévaloir, rapprochant l’activité culturelle d’une activité théorétique, valant pour elle-même, et non pour vérifier une maîtrise. Au-delà de l’enfant « acteur », il s’agit finalement de former un enfant « auteur » (Hétier, 2015). 

 

Dans ce jeu entre la réception comme expérience du monde et des œuvres, et « l’activité créatrice » qui ouvre à la transformation imaginative d’un « déjà-là », se forme finalement à la fois une capacité de perception et une capacité d’expression, une voix. La perception renvoie à la sensibilité. Laugier évoque ainsi, dans un développement sur le care, une « éthique de la perception particulière des situations, des moments, de « ce qui se passe » » (Laugier, 2009, 168). Or, précisément, l’Anthropocène se présente aussi comme un dérèglement de nos sens, comme artificialisation de nos vies et insensibilisation au vivant. Nous ne faisons pas assez attention à ce que nous faisons, et à ce que ça implique, à chaque fois, concrètement, dans notre rapport au vivant. Complémentaire – et pas moins importante – est la capacité d’expression. En ce sens il est tout aussi question de trouver une voie que d’exprimer une voix. Laugier évoque « une compétence qui n’est pas seulement affaire de connaissance ou de raisonnement, mais d’apprentissage de l’expression adéquate, et d’éducation de la sensibilité » (Laugier, 2009, 179). Trouver sa voie, c’est exprimer sa manière d’être, et il importe aujourd’hui de trouver d’autres manières d’être que dans la consommation industrielle et destructrice. Exprimer sa voix, c’est ne pas renoncer à investir les institutions démocratiques, tout en ayant toujours en tête qu’on est un vivant parmi d’autres vivants – qui tous n’ont pas voix au chapitre –, et intégrer ainsi des droits plus larges que ceux de la seule citoyenneté. 

 

Conclusion

 

L’entrée dans l’Anthropocène, avec son cortège d’effondrements qui menacent, suppose à la fois des actions politiques urgentes et résolues, et une autre forme de préparation de l’avenir. Il ne peut plus s’agir de viser le développement de compétences illimitées ou d’accumuler des savoirs pour faire fonctionner un monde qui se perd dans une fuite en avant. Le monde des humains est dorénavant aussi, et de façon incontournable, compris dans un monde d’interdépendances, non seulement dans la proximité, mais aussi globalement, à l’échelle de la Terre elle-même. L’humain est en quelque sorte « ramené au vivant », paradoxalement, par la fragilisation du système-Terre et celle de toute l’architecture du vivant (du fait de l’interdépendance de toutes les formes de vie). Vivre ou survivre demain signifiera être capable de se relier au vivant, à la conscience de son interdépendance avec d’autres formes de vie et pour cela de la percevoir sensiblement comme telle. L’éducation doit ainsi viser l’affinement de la sensibilité, par des expériences multiples et patientes, aussi bien avec et dans la nature (en tant que « tout » comprenant l’ensemble des formes de vie) – pour sentir le vivant, pour se sentir vivant – que dans la culture (en tant que « monde » constituant le milieu humain) – pour nourrir sa sensibilité. Cela prendra du temps, et même en situation d’urgence, ce temps n’est pas compressible. 

 

Références Bibliographiques 

 

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Winnicott, D-W. (1975, [1971]). Jeu et réalité. Gallimard. 

 

Notes

 

[←1

 Oury Fernand & Pain Jacques (1972), Chronique de l’école caserne, Maspéro. p. 277. 

[←2

 Pour cet épisode, Émile n’est pas nommé. Rousseau indique seulement « mon élève ». 

[←3

 « Ne pouvant tout, ils croient ne rien pouvoir ». (Rousseau, 1966, 105) 

Annuel de la recherche en philosophie de l’éducation ISSN 2779-5292