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mardi 2 mars 2021

Pour citer ce texte : Fabre, M.. (2021). La pédagogie saisie par la neuro-éducation : espoir ou imposture ?. Annuel de la Recherche en Philosophie de l’Education , 1 , 168-183.
[https://www.sofphied.org/annuel-de-la-recherche-en-philosophie-de-l-education/arphe-2020/dossier/article/la-pedagogie-saisie-par-la-neuro-education-espoir-ou-imposture]

La pédagogie saisie par la neuro-éducation : espoir ou imposture ? 

 

Michel Fabre 

 

Résumé:  

 

Cette contribution questionne les prétentions de la neuro-éducation à se présenter comme La nouvelle Science de l’éducation, susceptible de révolutionner la pédagogie. Il s’agit, par une analyse de quelques travaux exemplaires, de se forger un jugement critique au-delà des « neuro-mythes » suscités par un enthousiasme excessif ou, au contraire, un refus de non-recevoir idéologique. Nous privilégierons l’étude des travaux de Stanislas Dehaene, professeur de psychologie cognitive au Collège de France et président du Conseil Scientifique de l’Éducation nationale. En quoi les résultats obtenus par les neuro-sciences fournissent-ils des éclairages nouveaux sur les apprentissages ? Ensuite, si tel est le cas, comment ces disciplines conçoivent-elles le transfert de leurs résultats dans les classes ? Enfin, et plus généralement, les prétentions des neuro-sciences à transformer les pratiques éducatives constituent-elles ou non un cas d’applicationnisme ? 

Mots-clés:

 

Applicationnisme, Neuro-sciences, Pédagogie, Sciences de l’éducation

 

Abtract:  

 

This paper questions the claims of neuro-education to present itself as The new Science of education, likely to revolutionize pedagogy. It analyses some exemplary works, to form a critical judgment beyond the "neuro-myths" caused by an excessive enthusiasm or, on the contrary, an ideological refusal to accept. We will focus on studying the work of Stanislas Dehaene, professor of cognitive psychology at the Collège de France and president of the Scientific Council for National Education. First, how do neurosciences’s results provide new insights into learning? Then, if that is the case, how do these  sciences conceive the transfer of their results in the class-rooms ? Finally, and more generally, do the claims of neuroscience to transform educational practices is, or not, a case of applicationism?

 

Keywords:

 

Applicationnism , Neuro-sciences, Pedagogy,    Science education 

 

Introduction 

 

Durkheim (1985) hésite entre deux définitions de la pédagogie. D’un côté, il la distingue rigoureusement de l’art de l’éducateur comme des sciences de l’éducation et en fait une théorie-pratique : une réflexion sur la pratique en vue de l’améliorer. De l’autre, il se demande sur quelle science « constituée et incontestée » pourrait bien se fonder cette réflexion sur la pratique. Durkheim reste pris dans le paradigme de la science appliquée. Mais la sociologie est à l’état naissant et la psychologie bien incomplète. Bref, les sciences de l’éducation sont à construire. Alors, en attendant la constitution de ces sciences, l’urgence des réformes commande de gérer les crises de l’éducation en innovant, sans filet, mais avec toute la prudence possible.  

 

Les candidates ne manqueront pas pour venir remplir le vide indiqué par Durkheim et fonder enfin la pédagogie sur une science véritable : la médecine, la psychologie ou la sociologie. Aujourd’hui, ce sont les neuro-sciences et leur dérivé, la « neuro-éducaion », qui prétendent venir combler l’espoir de Durkheim, suscitant à la fois enthousiasme et méfiance chez les politiques, les enseignants et les parents d’élèves. 

 

Les neuro-sciences sont apparues, depuis les années 1990, dans le champ scientifique, bouleversant quelque peu les frontières entre biologie, psychologie cognitive et intelligence artificielle (Chamak, 2011; Plas, 2011). Elles étudient les relations entre la cognition et le cerveau à l’aide de techniques d’imagerie cérébrale. L’irruption des neuro-sciences dans le champ des sciences humaines fait débat et rappelle les controverses théoriques entre le rationalisme critique (Karl Popper, Hans Albert) et l’école de Francfort (Theodor Adorno, Jürgen Habermas) concernant la légitimité d’une approche naturaliste de l’esprit humain et des relations sociales ainsi que les dérives possibles d’une conception scientiste et technologique de l’éducation (Ronbichaud, Schwimmer, Gauthier-Lacasse, 2018). Il ne s’agit pas, pour nous, de condamner cette approche matérialiste de l’esprit au nom d’une conception spiritualiste, ou même de lui opposer une approche phénoménologique (Changeux et Ricœur, 1998). Il n’est pas question non plus de mettre en doute la légitimité et l’intérêt d’une exploration naturaliste du cerveau humain (Dehaene, 2014). Par ailleurs, nous n’avons pas compétence pour évaluer la pertinence scientifique des neuro-sciences ni leur rigueur méthodologique (Gaussel et Reverdy, 2013).  

 

Plus modestement, cette contribution voudrait questionner les prétentions de la neuro-éducation à se présenter comme La nouvelle Science de l’éducation, susceptible de révolutionner la pédagogie. Il s’agit, par une analyse de quelques travaux exemplaires, de se forger un jugement critique au-delà des « neuro-mythes » (Ibid) suscités par un enthousiasme excessif ou, au contraire, un refus de non-recevoir idéologique. Nous privilégierons, parmi les innombrables publications anglo-saxonnes et franco-phones sur le sujet, l’étude des travaux de Stanislas Dehaene, professeur de psychologie cognitive au Collège de France et président du Conseil Scientifique de l’Éducation nationale, lequel a pour objet de donner un avis sur l’éducation du pays et de promouvoir la recherche scientifique sur les pratiques éducatives (Dehaene, 2007, 2010, 2011, 2014, 2015). 

 

D’où un triple questionnement. D’abord en quoi les résultats obtenus par les neuro-sciences fournissent-ils des éclairages nouveaux sur les apprentissages ? Ensuite, si tel est le cas, comment ces disciplines conçoivent-elles le transfert de leurs résultats dans les classes ? Enfin, et plus généralement, les prétentions des neuro-sciences à transformer les pratiques éducatives constituent-elles ou non un cas d’applicationnisme ? 

 

1. Les apports de la neuro-biologie à l’éducation 

 

Les propositions générales, voire les préconisations des neuro-sciences en matière de démarche d’enseignement méritent-elles l’indice doriginalité dont on les crédite souvent ? Par ailleurs, dans des domaines précis tels que l’apprentissage de la lecture ou de l’arithmétique, quelle signification pédagogique accorder à des résultats qui ne semblent, pour le moment du moins, que très partiels et fragmentés ? 

 

1.1. Les résultats sur l’apprentissage en général 

 

Dans son Cours de 2015 au collège de France Stanislas Dehaene fait le bilan des résultats généraux des neuro-sciences concernant l’éducation. Il s’attarde, en particulier, sur la notion de plasticité cérébrale. Dans ce domaine, les résultats viennent confirmer ceux de la psychologie du développement. Les relations de l’inné et de l’acquis ne doivent pas être pensées en termes additifs, mais en interaction. Il existe des câblages neuronaux à la naissance, mais le cerveau (et surtout le cerveau humain) s’avère d’une grande plasticité. Il faut le penser comme un super-ordinateur connexionniste qui fonctionne selon un algorithme fondamental dit de « l’inférence bayésienne » (Dehaene, 2014, p. 135)1 . Le cerveau propose des inférences, des hypothèses, des prédictions. Il les teste en fonction des signaux reçus de l’extérieur et les ajuste selon ces données. Cet ordinateur, qui fonctionne en partie de manière automatique et donc inconsciente, se met en route très tôt chez l’enfant. On peut toutefois apprendre à tout âge, mais on observe, pour certains apprentissages (par exemple pour les langues étrangères) des « fenêtres d’opportunité », des périodes sensibles favorables. Toutefois, il n’existerait pas de périodes critiques après lesquelles tel ou tel apprentissage ne serait plus possible. L’idée, assez commune en psychologie, que le développement humain se caractérise par une très longue fenêtre d’opportunité, par rapport aux autres animaux, se voit donc confirmée. Par ailleurs, l’étude des pathologies montre comment le cerveau se réorganise lorsqu’une de ses régions est lésée, ce qui oblige à penser réseaux de neurones plutôt que localisations cérébrales.  

 

Dehaene souligne également l’importance de l’enrichissement du milieu dans les apprentissages ainsi que le rôle favorable des émotions positives (motivation, plaisir d’apprendre) par rapport à la peur ou le stress, d’où le regain d’actualité des thématiques du bien-être et des émotions.  

 

Comme le cerveau fonctionne selon la logique de l’enquête, l’apprentissage suppose l’engagement actif de l’enfant. Pour Dehaene et ses collaborateurs (2011), un sujet passif n’apprend pas. Ce qui semble confirmer l’idée des pédagogies actives, du moins celles qui sont suffisamment structurées pour alterner des périodes d’enseignement explicite et des périodes de test de connaissances permettant la correction immédiate des erreurs. Par contre, une « pédagogie de la découverte », qui laisserait l’enfant apprendre par lui-même, se voit condamnée. La nécessité d’un environnement structuré et d’un guidage par l’enseignant s’impose, ce qui rejoint le consensus pédagogique et didactique sur l’intérêt de l’explicitation et du guidage. Ces résultats généraux offrent un fondement naturaliste au principe d’éducabilité, ce qui n’est pas rien. Toutefois, on ne voit pas trop ce que les neuro-sciences ajoutent à la psychologie de Bruner ou de Vygtgoski ou même aux courants de l’école nouvelle qui ont renoncé à la non-directivité (Bruer cité in Gaussel et Reverdy, 2013 p. 15). On peut certes entendre le plaidoyer, fondé sur les résultats de Pisa, pour une école plus aidante et moins stressante. Mais pourquoi préconiser ce qui existe déjà dans les classes depuis longtemps ? On lit par exemple que l’école maternelle devrait fournir aux enfants un environnement riche, des jeux cognitifs préparant l’apprentissage de la lecture et de l’écriture, du matériel concret comme celui de Maria Montessori (Dehaene et Montialoux, 2012). On apprend avec étonnement, comme s’il s’agissait d’une découverte récente, que l’apprentissage de la lecture devrait être motivant, ludique, progressif, adapté au niveau des élèves et dédramatisant l’erreur. Toutes ces recommandations, qui se présentent avec un fort coefficient de scientificité, ne témoignent-elles pas d’une méconnaissance des acquis de l’histoire de la pédagogie, des recherches en sciences de l’éducation (notamment celle de la 70° section du CNU) et tout simplement de ce qui se fait dans les classes ? 

 

Pour être juste, il faut signaler l’intérêt de la théorie dite du « recyclage neuronal » qu’avance Dehaene. Cette hypothèse vient clarifier quelque peu les relations entre l’inné et l’acquis et procure un fondement naturaliste à l’idée de saut cognitif, ou de rupture épistémologique, dans les apprentissages scolaires. Dans l’apprentissage de la lecture, la reconnaissance des lettres et des mots n’est possible qu’en « recyclant » l’aire du cortex visuel que l’évolution a destinée à la reconnaissance des visages, des objets et les formes géométriques. Il en est à peu près de même avec l’acquisition des nombres et des opérations arithmétiques. Il semble qu’existe chez le jeune enfant, comme déjà chez les animaux supérieurs, un « sens des nombres » (un, deux, trois, beaucoup, rien…), localisé dans certaines aires cérébrales permettant des calculs approximatifs nécessaires à la survie de l’individu et des groupes. En résumé, les catégories kantiennes (l’intuition de l’espace, du temps, des nombres, de la causalité) correspondraient à des fonctions spontanées de l’activité cérébrale des animaux supérieurs et des humains activées dès la naissance.  

 

Dans cette hypothèse, ce qui caractérise l’humain serait la possibilité d’un recyclage intensif, avec l’accès au symbolique, le langage, les nombres…, d’activités spontanées du cerveau, montées par l’évolution et ordonnées à la survie. Cette théorie fournit des hypothèses intéressantes susceptibles d’expliquer bien des difficultés d’apprentissage comme la dyslexie ou la dyscalculie… (Gaussel et Reverdy, 2013). Elle constitue la seule véritable nouveauté repérable dans les résultats généraux des neuro-sciences concernant l’éducation dans les écrits de Dehaene que nous avons étudiés. 

 

1.2. Les apprentissages spécifiques en lecture et arithmétiques 

 

Qu’en est-il à présent de l’apport des neuro-sciences sur un apprentissage bien précis comme la lecture ? Ici Dehaene (2011) se montre à la fois hardi et prudent. Certes, il proclame haut et fort qu’il existe désormais une « véritable science de la lecture » (Ibid, p. 65). Il avoue toutefois que « la connaissance du cerveau ne permet pas de prescrire une unique méthode de lecture » (Ibid, p. 11), à plus forte raison de préconiser la meilleure méthode (Ibid, p. 65). Par exemple, elle ne permet pas de trancher entre méthode analytique, partant du mot pour le décomposer en lettres et méthode synthétique, partant des lettres pour composer des syllabes et des mots (Ibid, p. 66.). Tout au plus, cette science de la lecture permet-elle de définir de grands principes d’apprentissage, qui - dit l’auteur lui-même - n’ont rien de révolutionnaire et que bien des enseignants jugeront naturels (Ibid). Ces idées ont toutefois le mérite, selon l’auteur, d’être confirmées par un nombre important de recherches expérimentales.  

 

Quels sont donc ces résultats ? Pour Dehaene, lire c’est avant tout développer une connexion efficace entre la vision des lettres et le codage des sons du langage. Les recherches évoquées par Dehaene, comme les siennes propres, mettent l’accent sur la reconnaissance visuelle des lettres et sur la correspondance grapho-phonétique. C’est donc l’enseignement explicite du code alphabétique qui fournit le premier principe de la méthode d’apprentissage, ceci à l’encontre de toute méthode dite « globale ». De là en découlent six autres : 1) progression rationnelle en partant des correspondances graphèmes-phonèmes les plus fréquentes et les plus régulières; 2) association de la lecture et de l’écriture; 3) automatisation des règles permettant de se concentrer sur le sens; 4) choix rationnel des exercices; 5) engagement actif de l’enfant ; 6) progression non mécanique adaptée au besoin des enfants.  

 

Là encore, les résultats des neuro-sciences viennent largement corroborer ce que les recherches sur la lecture avaient déjà montré dans les conférences de consensus (2003, 2016). On notera toutefois la place prépondérante donnée au déchiffrage et donc au privilège du code sur le sens.  Qu’en est-il du désir de lire dont Rousseau et l’école nouvelle faisaient le principal ressort de l’apprentissage ? Il n’est que vaguement évoqué. Pas une fois l’abondante littérature que les sciences de l’éducation ont produite sur la lecture dans ses dimensions psychologiques, sociales, culturelles, n’est citée. D’où une conception très étriquée des apprentissages du code avec une vague évocation de l’environnement culturel nécessaire aux apprentissages.  

 

2. Du laboratoire à la classe 

 

Quelles que soient les critiques qu’on pourrait faire à cette conception de la lecture, Dehaene pense détenir les clés de l’apprentissage du lire. Le seul problème semble être le passage du laboratoire à la salle de classe. « La science de la lecture est solide : les principes pédagogiques qui en découlent sont aujourd’hui bien connus » - dit Dehaene (2011, p. 116).  Pourtant, l’auteur semble hésiter. À deux pages d’intervalle, il déclare tantôt que « seule leur mise en application dans les classes demande encore un effort important » et tantôt qu’« il ne reste qu’un petit effort à franchir » (Ibid, p. 116-117). Comment penser alors les rapports du laboratoire à la salle de classe et y importer les méthodes construites à titre expérimental ? 

 

2.1. Une expérimentation pédagogique 

 

Il s’agit par exemple de vérifier l’effet des pratiques éducatives sur les scores de lecture par la comparaison systématique de groupes d’enfants qui reçoivent des enseignements différents » (Dehaene, 2011, p. 103). Il faut donc constituer des séquences d’enseignement ne différant chaque fois que sur un seul point pour pouvoir isoler les facteurs ayant un impact sur l’apprentissage. Les résultats doivent être évalués avec des tests standardisés, en aveugle. Dans l’expérimentation de Dehaene et de son équipe, 1800 élèves de cours préparatoires de milieux défavorisés sont testés. La moitié des enseignants choisis au hasard reçoit une formation à la science de la lecture et les classes reçoivent une aide spéciale quatre fois par semaine, par groupes de cinq, sous la responsabilité d’un adulte. Or - constate Dehaene - les résultats s’avèrent très décevants : les enfants des groupes expérimentaux ne progressent guère plus que ceux des groupes témoins et leurs performances restent bien en deçà de celles des élèves de milieux favorisés (Dehaene, 2011).  

 

Comme le souligne Roland Goigoux (2013), cet échec ne débouche, chez Dehaene sur aucune remise en question. Pourtant, aussi bien le cadre théorique que les outils méthodologiques ou la démarche peuvent être questionnés. D’abord, le modèle théorique d’apprentissage sous-estime les activités d’écriture alors que toutes les méta-analyses des recherches sur la lecture en montrent l’importance. Il met l’accent sur l’identification des mots au détriment de la compréhension et du vocabulaire, ce qui est discutable. Ensuite, les outils didactiques utilisés laissent perplexe : peut-on transformer par exemple, directement, des instruments d’évaluation en outils d’intervention ? Enfin, rien n’est mis en cause du plan expérimental. Quand on connaît la variété des facteurs qui interviennent dans le fonctionnement de la classe, comment prétendre organiser un enseignement expérimental de la lecture qui ne diffère que sur un seul point de l’enseignement du groupe témoin ? Et surtout comment mettre en place un tel dispositif sans observation des pratiques ordinaires ni des pratiques expérimentales ? Dans de telles conditions, comment savoir si les unes diffèrent bien des autres et si les pratiques prescrites sont effectivement appliquées et comment ?  

 

2.2. Applicationnisme et technocratie 

 

Il est significatif que, dans l’expérience de Dehaene, les deux seules causes de l’échec soient rapportées au défaut de formation des enseignants d’une part et au caractère local et ponctuel des transformations apportées dans les manières d’enseigner, d’autre part. D’un côté les enseignants ne seraient pas suffisamment formés à la science de la lecture, de l’autre, c’est tout l’environnement scolaire qu’il faudrait changer de la classe maternelle au cycle 3. Dehaene évoque alors les expérimentations anglaises et danoises à l’échelle nationale (Dehaene, 2011, p. 116). On comprend que le véritable enjeu des recherches, c’est d’asseoir des politiques scolaires sur des fondements scientifiques et de réformer l’école à partir de « bonnes méthodes » définies au préalable par de vrais chercheurs dans de vraies sciences. Il y a donc, comme le souligne, avec raison, Goigoux, une connivence entre le scientisme et le politique, soit la volonté de réformer l’école de manière technocratique. N’est-ce pas l’essence même de l’applicationnisme ? 

 

3. Science et pédagogie 

 

Quels sont les modèles épistémologiques et politiques sous-jacents à « cette éducation par la preuve » dont se réclame la « neuro-éducation » ? Le rapport entre sciences contributives et pratiques de l’éducation est-il nécessairement applicationniste, comme semble le suggérer Dehaene ? 

 

3.1. Le paradigme médical 

 

Les neuro-sciences prétendent s’appuyer sur le modèle de la recherche médicale « evidence-basedmedicine» (EBM), en français « médecine fondée sur des preuves» (Gay, Beaulieu, 2004). Or ce modèle n’est pas applicationniste, ou du moins de l’est plus.  

 

On peut en effet définir l'applicationnisme par trois caractéristiques : a) la séparation tranchée entre la science et les techniques ou pratiques; b) le transfert direct des résultats scientifiques à la pratique; c) le taylorisme transformant les praticiens en exécutants. Qu’en est-il dans l’EBM ? On a l’habitude de définir la médecine par deux composantes : la connaissance de la maladie et l’art de guérir. Si la première relève de la science, la seconde, la pratique médicale, repose sur un rapport singulier entre médecin et malade où se joue l’appréhension plus ou moins intuitive d’un cas. Toutefois, pour pouvoir évaluer l’efficacité des traitements et réduire l’aspect subjectif du diagnostic, les médecins ont inventé « l’essai thérapeutique contrôlé » dont les trois principes sont : 1) le rôle central des statisticiens dans la planification des essais, le contrôle de leur déroulement et l’évaluation des résultats ; 2) l’introduction de critères objectifs quantifiant les conséquences d’un traitement; 3) enfin, la randomisation, c’est-à-dire la répartition au hasard des malades entre groupes témoins et groupes expérimentaux et l’évaluation des résultats en aveugle (Löwy, 1998).  

 

Il faut prendre au sérieux la référence à l’EBM, mais ne pas la dévoyer. Le concept a d’ailleurs évolué en fonction des critiques qui mettaient en garde contre un risque de standardisation de la clinique médicale (Gay et Beaulieu, 2004). La définition qu’en donne, en 2000, l’un de ses promoteurs, David Sackett, est désormais celle-ci : « La médecine fondée sur les preuves consiste à utiliser de manière rigoureuse, explicite et judicieuse les preuves actuelles les plus pertinentes lors de la prise de décisions concernant les soins prodigués à chaque patient » (Cité dans Utard, 2014). Il ne s’agit donc pas ici d’imposer au praticien des recettes ou des directives contraignantes. Il s’agit d’éclairer sa pratique. En réalité, l’EBM repose sur les trois composantes de la décision : 1) les circonstances de soins et la situation clinique ; 2) les valeurs du médecin et du patient ; 3) les données actuelles de la science apportées par la clinique, avec leurs niveaux de preuve (Ibid). Dans cette perspective, la compétence clinique réside dans la capacité du médecin à faire la synthèse de ces trois facteurs afin de prendre la décision la plus adaptée et en tenant compte de l’avis du malade. 

 

Il est clair que la conception de l’EMB chez Dehaene n’intègre pas les critiques qui ont été faites à ce dispositif. Il semble au contraire s’en faire une conception réductrice, de type applicationniste. C’est pourquoi la meilleure défense contre les prétentions des neuro-sciences à dire la vérité éducative n’est peut-être pas de rejeter l’idée d’une « éducation basée sur les preuves » au nom de la spécificité du champ éducatif. Elle est plutôt, à notre avis, de s’autoriser de l’interprétation qui est faite aujourd’hui de ce paradigme en médecine, pour en exiger une définition plus ouverte et plus critique en éducation. En effet, dans l’EMB d’aujourd’hui, le médecin n’est pas réduit à un technicien appliquant ce qui a été concocté dans les laboratoires. Il est conçu comme un praticien réflexif ayant la pleine responsabilité du diagnostic et du traitement. L’EMB a pour but de lui fournir une information scientifique fiable, tout en sachant que ce qu’il traite n’est pas une maladie, mais un malade, dans un contexte global où entrent en jeu, en plus des savoirs, un certain nombre de choix de valeurs. Pourquoi ne pas réclamer pour l’enseignant, un statut épistémologique analogue à celle du médecin, dans l’éducation fondée sur des preuves ? 

 

3.2. Sciences de l’éducation et pédagogie 

 

Pour les sociologues, la médecine est une vraie profession alors que l’enseignement n’est qu’une semi-profession (Boudoncle, 1991), très cadrée par l’État. C’est pourquoi, malgré la rhétorique récurrente sur la liberté de méthode, l’enseignant est soumis à toutes sortes de contraintes et de contrôles. Ceci explique sans doute pourquoi le paradigme de l’EMB s’infléchit si facilement en applicationnisme lorsqu’il concerne l’école, surtout s’agissant des neuro-sciences dont on sait quel crédit leur accorde actuellement le ministère de l’Éducation. 

 

Frédéric Saussez et Claude Lessard (2009) soutiennent que, dans l’éducation comme dans la médecine, les savoirs issus de la recherche doivent pouvoir s’articuler aux savoirs professionnels des praticiens. Ils distinguent toutefois, deux modes d’articulation très différents : intégratif ou associatif. Le mode intégratif est élitiste et technocratique. Il se fonde sur la recherche du bien commun par un groupe particulier (ici les savants). Le mode agrégatif reconnaît, lui, la pluralité des logiques et des acteurs et les mets en concurrence. Les deux modèles ont leurs avantages et leurs inconvénients. Le mode associatif peut faire perdre au champ éducatif sa cohérence et sa consistante. Les auteurs parlent « d’auberge espagnole ». En revanche, le modèle intégratif, s’il unifie le champ, peut mener « à une forme d’hégémonie, d’orthodoxie, de hiérarchisation ou d’exclusion » (Saussez et Lessard, Ibid). Le champ éducatif serait ainsi soumis aux alternances de mouvements intégratifs et associatifs. L’Éducation basée sur des preuves, telle que la conçoit actuellement le ministère de l’Éducation, participerait au mouvement intégratif envisageant de réduire les incertitudes de la pratique en limitant l’espace de décision des enseignants.  

 

Les deux modèles renvoient à deux conceptions de l’éducation. Dans l’option intégrative, l’éducation est un ensemble de gestes techniques dont les valeurs sont la rationalité et l’efficience. Dans l’option associative, l’éducation est une praxis qu’on ne peut réduire totalement à la rationalité scientifique parce qu’elle implique la rencontre de l’humain dans un contexte spécifique ici et maintenant et met en jeu des valeurs. Aristote opposait ainsi la rationalité de la science au raisonnable de l’action qu’il plaçait sous la vertu de prudence (Aristote, 1965, VI, II, 5) et ses trois dimensions a) ontologique, le sens du kairos, de l’opportunité; b) argumentatif (la délibération et la recherche du juste milieu); c) politique, celui de la décision (Aubenque, 1963). L’action de l’enseignant, tout comme celle du médecin ne relève- t-elle pas de cette prudence aristotélicienne ? C’est bien ce que Durkheim avait en tête en forgeant  son concept de théorie-pratique et en prenant, pour l’illustrer, en autres exemples, celui du médical. 

 

3.3. La théorie-pratique 

 

Du point de vue épistémologique et politique, la question que pose la neuro-éducation est celle du type de rapport possible entre sciences et pratiques éducatives. Frédéric Saussez et Claude Lessard (2009) évoquent la différence entre Charles Hobbard Judd et John Dewey dans leur conception de la recherche en éducation au début du XX° siècle. Le premier pense que la recherche peut directement infléchir les pratiques dans une perspective de science appliquée. Dewey pense au contraire qu’elle ne peut y intervenir que de manière indirecte par la médiation des enquêtes, menées par les praticiens eux-mêmes. De même Mikaël Huberman (1989) ne cesse-t-il de multiplier les intermédiaires entre le système diffuseur et le système utilisateur. Du côté diffuseur, il préconise la création d’un « centre pédagogique » chargé d’établir un trait d’union entre chercheurs et praticiens. Et du côté des utilisateurs, il propose un sous-système chargé de trois fonctions : résolution de problèmes immédiats des enseignants, coordination des établissements, maintien des relations avec le système diffuseur.

 

Si l’on suit ces travaux, le rapport entre science et pratique ne peut avoir lieu que par la médiation d’une instance intermédiaire, que dans la foulée de Durkheim (1985) et de Houssaye (1993) on peut définir comme théorie-pratique. Ni science ni art, la pédagogie est une réflexion du praticien sur sa pratique en vue de l’améliorer. Elle relève de la prudence au sens d’Aristote, c’est à dire du jugement concernant l’action : ce qu’il convient de faire ici et maintenant étant donné le contexte et le cas, avec tout ce que l’on sait et tout ce que l’on est.  

 

Cette réflexion produit des savoirs spécifiques (Fabre, 2002). Le pédagogue invente des techniques, des procédés d’apprentissage, disons des faisables pragmatiques. Mais les techniques ont un esprit (l’esprit Freinet, Montessori…). Le pédagogue défend ainsi une vision de l’enfance et de l’éducation, c’est la dimension axiologique, éthique ou politique. Enfin, la pédagogie est une expérience du changement avec ses problèmes et ses épreuves (Fleury et Fabre, 2017), ce qui lui donne une intelligence des cheminements, voire des errements, ceux des élèves comme les siens propres. La pédagogie est donc productrice de savoirs pragmatiques, de vision politique ou éthique et de savoirs herméneutiques et critiques. Les savoirs pragmatiques sont aisément transférables. Les visions politiques sont ancrées dans des expériences personnelles, mais partageables (l’esprit Pestalozzi, l’esprit Freinet). Enfin, les savoirs herméneutiques et critiques sont des savoirs narratifs qui relèvent d’un cheminement individuel. S’il en est ainsi, on comprend que les savoirs scientifiques (issus par exemple de la neuro-biologie) n’ont de chance d’influencer les pratiques que si s’avère pleinement reconnu ce niveau intermédiaire entre science et pratique que constitue la pédagogie. Aucune science ne peut dire au praticien ce qu’il doit faire parce qu’il y a un abîme entre savoir scientifique et action, comme Aristote l’avait bien compris en forgeant son concept de prudence. Les préconisations générales ou particulières de la neuro-biologie n’ont donc de chance d’être entendues que si elles viennent féconder l’inventivité pragmatique du pédagogue et s’avèrent compatibles avec sa vision éthique et politique et son savoir des cheminements. Ce n’est pas parce que les enseignants auraient mal compris les principes de la « science de la lecture » qu’ils ne pourraient l’appliquer en classe, comme le croit Dehaene. C’est que, concernant cet acte complexe de l’éducation, l’applicationnisme n’est pas de mise. La relation entre sciences et pratiques ne peut se faire sans la médiation de la pédagogie. 

 

La pédagogie vaut à la fois comme instance épistémologique en fonction du hiatus entre science et action. Elle vaut également comme instance politique, car elle exige de reconnaître la responsabilité et l’autonomie de l’enseignant, non comme technicien chargé d’appliquer des instructions, mais comme praticien réflexif, qui tout comme le médecin, s’instruit certes des sciences, mais bien d’autres choses aussi, pour orienter son action.  

 

Conclusion 

 

Redisons-le, il ne s’agit pas de nier l’intérêt d’une science du cerveau et de ses applications possibles (Dehaene, 2011). Ce sont bien les prétentions éducatives des neuro-sciences qui sont concernées ici. Or, à la lecture des travaux de Dehaene, qui semble être le chef de file de cette tentative de neuro-éducation, les résultats affichés ne nous semblent pas mériter l’enthousiasme des thuriféraires, qu’ils soient hommes politiques, enseignants ou parents. Les préconisations générales sur l’apprentissage ne font, en effet, pour l’essentiel, que conforter les acquis de la réflexion pédagogique, de la psychologie cognitive et des sciences de l’éducation. Il en est à peu près de même pour celles qui concernent les apprentissages spécifiques de la lecture ou de l’arithmétique. La prétention quelque peu exorbitante des  neuro-sciences à révolutionner les apprentissages en faisant table rase des acquis des autres sciences de l’éducation et de l’histoire de la pédagogie et, semble-t-il, dans l’ignorance des pratiques scolaires ordinaires ne semble donc pas fondée.  

 

L’enjeu de la neuroéducation, c’est évidemment la volonté de fonder scientifiquement les réformes pédagogiques sur « l’éducation basée sur les preuves ». Or Dehaene infléchit le paradigme médical dont il s’inspire, dans une logique applicationniste qui en dénature l’esprit. Du point de vue épistémologique, la relation du laboratoire et de la classe est pensée comme un transfert direct, sans la moindre logique de transposition ou de médiation (Goigoux et Cèbe, 2009). L’autre aspect, plus politique, de cet applicationnisme renvoie à une conception technocratique de la réforme dans laquelle des experts concoctent des préconisations que des enseignants techniciens sont censés appliquer. Dans cette nouvelle forme de taylorisme, il est nécessaire que soit niée, ou du moins ignorée, la figure de l’enseignant pédagogue, qui serait le pendant de celle du médecin, pensé comme praticien réflexif. C’est donc cette figure qui serait à promouvoir, du point de vue épistémologique et politique.  

 

Dans cette perspective, si la neuro-éducation abandonnait ses prétentions hégémoniques et acceptait de dialoguer avec d’autres disciplines, elle pourrait sans doute apporter sa contribution propre, au sein des sciences de l’éducation, et venir ainsi éclairer, au même titre que d’autres approches, l’action et la réflexion pédagogiques.   

 

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Notes

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 Cette analogie qui semble ici aller de soi est évidemment très discutable. Voir Andrieu, B. (2007).  La Neurophilosophie. PUF. 

Annuel de la recherche en philosophie de l’éducation ISSN 2779-5292