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lundi 14 mars 2022

Pour citer ce texte : FABRE, M.. (2022). Éduquer dans l’horizon de la catastrophe Hans Jonas et la problématicité radicale du monde Annuel de la Recherche en Philosophie de l’Education , 2 ,
[https://www.sofphied.org/annuel-de-la-recherche-en-philosophie-de-l-education/arphe-2021/dossier-partie-1-l-education-au-risque-de-la-catastrophe/article/eduquer-dans-l-horizon-de-la-catastrophe-hans-jonas-et-la-problematicite]

Éduquer dans l’horizon de la catastrophe Hans Jonas et la problématicité radicale du monde 

 

Michel Fabre 
Université de Nantes (CREN) 

 

Résumé  : Pour Hans Jonas, l’enjeu n’est pas seulement la survie de l’homme en tant qu’être vivant, mais sa survie éthique comme être capable de liberté et de responsabilité. Justifier les injonctions d’une responsabilité pour l’avenir nécessite un double fondement : ontologique (la valeur de la vie) et éthique (la responsabilité comme prise en charge du nouveau-né). Ce qui ne va pas sans tensions : entre critique radicale du prométhéisme et technophilie, entre catastrophisme et liberté, entre exigences de survie et de dignité. Quelles perspectives éducatives tirer de la pensée de Jonas ? Le schème parental semble imposer le paternalisme. Mais trois autres pistes, complémentaires entre elles, sont possibles : la conscience écologique de la jeunesse ; l’enseignement des savoirs de l’Anthropocène ; la prise en compte des problèmes « pernicieux » d’un monde devenu problématique d’un point de vue épistémologique (incertitude), éthique (irresponsabilité) et ontologique (précarité). 

 

Mots clés 
Hans Jonas, responsabilité, monde problématique, catastrophisme éclairé, éducation 

 

Summary : For Hans Jonas, the stake is not only the survival of man as a living being, but his ethical survival as being of freedom and responsibility. Justifying the injunctions of a responsibility for the future requires a double foundation : ontological (the value of life) and ethics (responsibility as taking care of the newborn). This is not without tensions : between radical criticism of Prometheism and technophilia, between catastrophism and freedom, between demands for survival and dignity. What educational perspectives can we draw from Jonas' thought ? The parenting scheme seems to prevail over paternalism. But three other tracks, complementary to each other, are possible : the ecological awareness of young people; the teaching Anthopocene’ knowledge; taking into account the "pernicious" problems of a world that has become problematic from an epistemological (uncertainty), ethical (irresponsibility) and ontological (precariousness) point of view. 

 

Keywords 
Hans Jonas, responsibility, problematic world, enlightened catastrophism, education 

 

Introduction

 

Hans Jonas (1903-1993) pose dans toute son œuvre la question de savoir quelle Terre allons-nous laisser à nos enfants et s’ils pourront non seulement y survivre, mais continuer à y mener une existence humaine authentique, capable de dignité et de responsabilité. Il s’inscrit ainsi dans la riche littérature de la deuxième moitié du XXe siècle axée sur la critique de la techno-science et des dégâts du progrès, littérature illustrée en France par Jacques Ellul et André Gorz, et en Allemagne par l’École de Francfort (Adorno, Horkheimer, Marcuse, Habermas), ainsi que par le dernier Heidegger et ses émules dissidents (Arendt, Anders, notamment). Jonas qui a fait sa thèse avec Heidegger appartient à ce dernier courant. Il apparaît ainsi, avec Anders, comme l’un des précurseurs du catastrophisme, éclairé ou non, et qui fait florès aujourd’hui. 

 

  Les interrogations sur la catastrophe et la survie sont devenues banales, ce qui peut nous amener à sous-estimer l’originalité de la pensée de Jonas. Pourtant Jonas pense la problématicité du monde plus radicalement encore que ne le font les courants de la problématologie marqués par les œuvres Dewey, Bachelard, Deleuze, Meyer (Fabre, 2009). Pour Jonas en effet le monde, non seulement a perdu ses repères épistémologiques et éthiques traditionnels, mais apparaît également et surtout ontologiquement problématique puisque, avec l’emballement de la techno-science et ses conséquences écologiques, c’est la survie des êtres humains et même de l’idée d’humanité qui est en jeu. 

 

Quelles perspectives éducatives peut-on attendre d’une pensée aussi radicale ? Jonas ne s’aventure pas volontiers sur ce terrain et c’est à partir de remarques, éparses dans son œuvre que l’on peut dessiner quelques perspectives. Quel sens peut avoir l’éducation dans un monde ontologiquement problématique, c’est-à-dire menacé dans son existence même, dans la perspective de la catastrophe ? Répondre à cette question, en prolongeant les esquisses qu’il nous a laissées sur le sujet, exige de la resituer dans le questionnement d’ensemble à la fois épistémologique, ontologique et éthique, de Jonas. 

L’originalité de la pensée de Jonas

 

La question de Jonas n’est pas de savoir comment l’humanité peut éviter de se suicider, ce qui reste une question de fait, mais bien si elle a le droit de le faire par un cynique « après moi le déluge ! ». Sa pensée n’est pas prudentielle, mais morale. 

 

Un style kantien

 

C’est pourquoi son éthique conserve un style kantien avec la formulation d’impératifs catégoriques. Jonas en donne deux expressions : « agis de façon que les effets de ton action soient compatibles avec la permanence d’une vie authentiquement humaine sur Terre » ; ou encore, de manière négative : « ne compromets pas les conditions pour la survie indéfinie de l’humanité sur Terre » (Jonas, 1993, p.31). Il s’agit toutefois d’un kantisme quelque peu hétérodoxe qui dépasse le souci de l’intention, de la bonne volonté, celui des conséquences, « des effets » de l’action. 

 

De Kant, Jonas retient l’idée de dignité humaine, de personne. Il ne s’agit pas seulement de garantir la survie biologique des hommes, mais bien d’assurer les conditions de leur existence éthique. Il se pourrait, en effet, que les exigences de la survie nous obligent à nous transformer en zombies, en esclaves ou en cyborgs, au détriment de ce qui fait la dignité humaine, à savoir la possibilité d’être responsables. Pour Jonas, la responsabilité oblige ses détenteurs « à rendre possible l’existence d’autres détenteurs futurs » (Jonas, 2015, p. 101). 

 

Mais comment justifier les commandements de cette morale ? Les impératifs kantiens reposent sur une base logique. Le voleur ou le criminel ne peuvent sans contradiction universaliser la maxime de leur action, à moins d’exiger une exception pour eux-mêmes. Mais il n’y a nulle contradiction à jouir du présent au point d’impacter l’avenir et les êtres qui ne sont pas encore nés ne peuvent faire valoir aucun droit. Pour fonder ses impératifs, Jonas va devoir articuler une ontologie de la vie à une éthique de la sollicitude (Fabre, 2021b). 

 

Une métaphysique de la vie

 

En effet, pour Jonas, l’obligation de perpétuer la vie ne peut venir que de la vie elle-même. D’où une métaphysique de la biologie, d’inspiration aristotélicienne, qui réinsère la finalité dans la nature d’où la science l’avait tirée. Tout en reconnaissant la légitimité de la biologie scientifique dont il ne remet jamais en question les résultats, Jonas voit dans le refus du finalisme une décision méthodologique qui repose, elle-même, sur une option métaphysique : celle du positivisme mécaniste (Jonas, 1966). Dès lors il n’est pas illégitime d’opposer à cette métaphysique implicite qui a pour ambition d’expliquer la vie, une métaphysique, parfaitement assumée comme telle, et qui s’efforce de la comprendre à partir de l’expérience qu’en fait l’être humain en tant qu’être vivant. Le biologiste doit-il, par peur de l’anthropomorphisme, se priver de la perspective que lui offre, sur son objet d’étude, le fait d’avoir un corps, d’être un organisme ? Le finalisme qui se manifeste dans la conscience de l’être humain et son souci de se maintenir en vie s’exprime déjà, en réalité, sous une forme plus ou moins larvée dans l’effort de tout organisme pour persévérer dans l’être. 

 

L’enjeu de cette option finaliste n’est pas seulement d’ordre épistémologique, mais ontologique. Il permet à Jonas d’inscrire le bien au sein de la vie même, en subvertissant la loi de Hume (1968) interdisant de passer de l’être à la valeur. L’étude du métabolisme montre qu’en tout organisme, la vie est auto-affirmation de soi, qu’elle se veut elle-même. Ce phénomène universel fait du conatus des êtres vivants une valeur objective au cœur de l’être, un bien. L’ontologie de la vie retrouve ainsi le « Fiat » de la Genèse : « Et Dieu vit que cela était bon ! ». La valeur n’est donc pas un phénomène purement subjectif, comme le pense le nihilisme contemporain, puisque dans le phénomène de la vie, l’être et le bien coïncident. 

 

La gnose : une clé herméneutique

 

Il est vrai toutefois que la liberté humaine peut refuser de reconnaître la valeur de la vie. Jonas (1978) voit l’archétype de ce refus dans la religion gnostique qu’il étudie dans son doctorat, sous le patronage de Martin Heidegger et de Rudolf Bultmann.  Pour la gnose, l’homme est jeté dans un monde hostile et mauvais dont il doit s’affranchir. Sa théologie dualiste opposant un vrai dieu, étranger et indifférent, n’intervenant pas dans la marche du monde, à un mauvais démiurge, créateur de l’univers et lui imposant sa loi. Dès lors, le salut consiste, pour l’homme, à s’extirper de ce monde pour rejoindre le vrai Dieu auquel son esprit est apparenté. 

 

Ce sont les analyses de Heidegger qui sous-tendent l’approche historique du gnosticisme, mais cette étude permet à Jonas d’interpréter, en retour, l’Être et le Temps (1964) comme un « roman gnostique », selon l’expression d’Émile Bréhier (Frogneux, 2001, p. 75). Les existentiaux d’Heidegger (l’être jeté, l’être pour la mort…) ne sont, en réalité, que des réactions émotionnelles caractéristiques des temps de crise. Toutes les formes de ce que Jonas appelle le « nihilisme contemporain », l’existentialisme, mais aussi le marxisme, constituent autant d’avatars de l’acosmisme gnostique. Ainsi l’utopie de Bloch (1976) et son Principe espérance (qui constitue la cible explicite du Principe responsabilité) renouvelle-t-il le geste gnostique du partage du temps entre un passé et un présent dépourvus de valeurs (sauf dans les cas précisément où il anticipe un avenir radieux) et un futur eschatologique promettant l’avènement d’une humanité authentique, enfin désaliénée. Pour Jonas, l’espérance dans les lendemains qui chantent et ses prétentions à améliorer l’humanité, détournent de la véritable tâche qui est de conserver et de préserver ce que l’humanité a de meilleur et qui s’exprime dans les génies du passé. L’utopisme est d’autant plus suspect que, dans le cas du marxisme de Bloch, il est intimement lié au culte du progrès et à l’arraisonnement de la terre par la techno-science, arraisonnement qui constitue précisément une nouvelle forme d’acosmisme, de haine du monde. 

 

La clé du gnosticisme peut évidemment être contestée, dans son ambition à rendre compte du nihilisme dans toutes ses formes. Elle pose, à nouveau frais, la question de la légitimité des temps modernes et même contemporains, si on peut les penser comme des avatars d’une religion de l’antiquité tardive (Blumemberg, 1999). Elle permet toutefois à Jonas de mettre en scène un débat métaphysique inégal entre, d’un côté, la reconnaissance d’une valeur objective, inscrire dans l’être même, telle que l’auto-affirmation de la vie dans tous les organismes et d’un autre, l’acosmisme, une attitude subjective, arbitraire, historique, propre aux périodes de crise. 

 

 L’anti-gnosticisme de Jonas fournit, par contrecoup, ce qui pourrait être la formule de son idéal éducatif : « donner l’amour du monde » selon l’expression d’Arendt (1972). D’où deux questionnements : comment promouvoir l’amour du monde sans alimenter le cercle suicidaire de la production/consommation ? Et si tout ne se vaut pas dans le monde, ne faut-il pas fonder l’éducation sur un modèle substantiel d’humanité promouvant les valeurs de modération, de respect de la nature, au-delà d’une définition seulement formelle de l’existence éthique comme responsabilité ? 

 

Le schème parental de la responsabilité

 

La démarche ontologique de Jonas qui inscrit la valeur dans l’auto-affirmation des êtres vivants s’avère toutefois insuffisante pour fonder une éthique de la responsabilité. En effet, rien n’empêcherait l’homme d’invoquer son droit à la vie pour justifier l’exploitation de la nature, sans égard pour l’avenir de l’humanité. C’est pourquoi Jonas cherche une expérience dans laquelle la vie à la fois s’auto-affirmerait et demanderait protection. Cette expérience est celle des parents auprès du nouveau-né, cette vie qui s’affirme dans sa fragilité. Dans les pleurs du nouveau-né, le devoir est dans l’être, la vie oblige. Certes la nature vient ici au secours de la morale dans l’amour parental ou l’instinct maternel. Mais Jonas tient à distinguer radicalement inclination et obligation. Le devoir de protection du nouveau-né constitue ainsi « l’archétype intemporel de toute responsabilité » (Jonas, 1993, p. 179), d’une responsabilité pensée non comme imputation, mais comme prise en charge. Et c’est par analogie à ce schème parental que Jonas tentera de penser les responsabilités politiques et éducatives, ce qui n’ira pas sans lui créer des difficultés comme Arendt l’en avait averti (Jonas, 2005). 

 

    Cette expérience, aussi fondamentale que celle du visage chez Lévinas, permet à Jonas d’articuler une éthique d’inspiration kantienne à une ontologie néo-finaliste de la nature : d’où le triptyque Aristote, Kant, Leibnitz sur lequel Jonas établit sa philosophie (Ricœur1992). 

 

Jonas et la problématicité du monde

 

 

Dans la responsabilité parentale pour le nouveau-né, la vie s’affirme dans son obstination et sa fragilité, tout comme le monde qui vient et que Jonas s’efforce de penser dans sa problématicité radicale. Cette radicalité s’exprime de trois manières. D’abord par son ampleur, puisqu’elle concerne la dimension épistémologique (l’incertitude), éthique (le nihilisme) et ontologique (la catastrophe). Ensuite parce que ces trois dimensions ne peuvent se traiter séparément, mais surdéterminent un certain nombre de questions cruciales de l’écologie politique d’aujourd’hui. Enfin, parce que la problématicité n’affecte pas seulement les questions qui s’avèrent difficiles à élaborer, mais également les réponses qu’on peut leur apporter, tant celles-ci apparaissent faibles, provisoires et suscitant de nouveaux problèmes. C’est pourquoi la pensée jonassienne s’avère affectée d’un certain nombre de tensions. 

 

La critique de la techno-science

 

La première tension concerne la problématicité ontologique du monde, sa fragilité. Jonas partage avec Heidegger (1958) et Anders (2002, 2011) la critique d’une techno-science qui arraisonne la nature, ne voyant en elle, comme d’ailleurs dans l’homme même, qu’un ensemble de ressources. Comme eux Jonas dénonce les dégâts d’une fièvre prédatrice, proprement suicidaire, qui sous-tend aussi bien le capitalisme que le communisme.  Il ne voit pas pour autant la technique comme un destin auquel on ne pourrait échapper. Ni le quiétisme du dernier Heidegger espérant une nouvelle époque de l’être ni l’activisme désespéré d’Anders pour retarder la catastrophe ne le satisfont. Jonas voit plutôt dans la technique moderne le dernier stade d’une odyssée de la liberté, inscrite au cœur de la vie et qui s’épanouit dans la volonté humaine. En effet, une liberté objective se manifeste déjà dans le métabolisme de l’organisme qui renouvelle perpétuellement sa matière tout en conservant sa forme. Elle gagne en intensité quand la vie déserte la sécurité du végétal pour la condition animale avec tous les risques, mais également tous les avantages évolutifs qui lui sont liés (la locomotion, la sensibilité, l’intelligence). Elle s’épanouit avec l’homme dont la main constitue le premier outil, créateur d’outils. 

 

Ce que la liberté objective de la nature a fait naître, la liberté consciente de l’homme peut le réguler, c’est-à-dire le modérer. Dans la techno-science, Prométhée est à présent déchaîné, mais on peut le ramener à son rocher, sans pour autant rendre aux dieux le feu qu’il leur a volé. Car, contrairement à un contresens assez répandu, Jonas n’est pas technophobe. Il pense même, au grand dam de son ami Anders, que le nucléaire peut être une solution à la raréfaction des ressources énergétiques (Jonas, 2005). Pour lui, d’une manière générale, les problèmes écologiques nécessitent un surcroît de science pour être traités. D’abord pour affiner les prévisions : après tout, ce sont les scientifiques (le GIEC) qui nous alertent sur l’imminence de la catastrophe. Ensuite parce que les remèdes au prométhéisme déchaîné de la techno-science prédatrice ne peuvent se trouver que dans une technologie orientée vers la survie, même s’il ne s’agit pas de céder aux mirages de la géo-ingénierie. Évidemment, Jonas a bien conscience que toute tentative de solution technique pour réparer les dégâts de la technique ne peut qu’engendrer de nouveaux problèmes, en une dialectique sans fin. 

 

L’agir responsable

 

La deuxième tension concerne l’agir responsable dans un monde qui s’avère épistémologiquement problématique dans la mesure où les effets des décisions technologiques qu’on ne peut pas ne pas prendre, excédent l’horizon de nos prévisions. Il faut « agir avec précaution », dit Jonas, en privilégiant toujours le scénario du pire, de sorte que l’on n’ait jamais à encourir de reproche de la part des générations futures. Ce « remords anticipateur » (Jonas, 2015, p. 112) n’est-il pas paralysant ? (Godard, 1999). Il excède sans doute les versions faibles du principe de précaution qui l’assortissent de conditions adjacentes (tels que les coûts économiques sociaux ou financiers par exemple), comme c’est souvent le cas dans la perspective de développement durable (Ferrari, 2010). Mais on ne saurait, inversement, comme Luc Ferry (2002) ou Dominique Lecourt (1990), faire de Jonas un adepte de la Deep-ecology, si on entend par là une attitude technophobe et anti-spéciste. Jonas pense que la maîtrise de la technique ne requiert pas moins, mais plus de technique, pourvu qu’elle soit maîtrisée et délibérément orientée vers la survie. Et s’il condamne la désinvolture des êtres humains envers les autres êtres vivants, il maintient son éthique dans le droit fil de l’anthropocentrisme kantien. L’homme n’est pas une espèce comme une autre. Il est, sinon le berger de l’être, comme le croit Heidegger, du moins le gardien de la création (Jonas, 1994). 

 

À la différence de son homonyme biblique, Jonas fils d’Amitaii, Hans Jonas prophétise la catastrophe pour qu’elle ne se produise pas, pour que ses contemporains prennent enfin conscience du danger et réagissent à temps (Dupuy, 2002). Selon cette perspective, le scénario du pire exige seulement que l’on s’assure de l’innocuité d’une décision, sur la base des connaissances disponibles. En réalité, cela revient à chercher, un peu comme au tribunal, de quel côté l’erreur est la moins grave : innocenter un coupable ou condamner un innocent. Ne vaut-il pas mieux se tromper par excès de prudence que par excès de témérité et laisser se développer des phénomènes dangereux et irréversibles ? Toutefois, le principe de responsabilité ne fonde pas le principe de précaution, même s’il ouvre une culture de la prudence (Larrère, 2003). Il questionne plutôt la logique comptable des coûts et avantages qui sous-tend la précaution. Une telle logique n’est plus pertinente si la problématicité de l’avenir est liée à l’évolution des systèmes complexes et à leurs effets de seuils qu’il ne faut surtout pas franchir, quels que soient les avantages momentanés que certains pourraient escompter de cette transgression (Dupuy, 2002). 

 

Survie et existence éthique

 

La dernière tension a lieu entre les deux exigences de l’éthique de Jonas, la survie biologique des êtres humains et la perpétuation d’une existence éthique d’êtres responsables. Il se pourrait bien en effet que l’imminence de la catastrophe nous incite à sacrifier notre dignité à l’impératif de survie. C’est ce qu’on pourrait appeler « l’argument du capitaine » (Jonas, 1973, p. 134). Quand le bateau fait naufrage, on se soumet corps et âme au seul maître après Dieu. Si prévenir la catastrophe exige une option de décroissance, comment la faire accepter d’une société de consommation effrénée ? Jonas doute des capacités de la démocratie à y parvenir, soumise qu’elle est aux pressions des lobbys et à la vision à court terme imposée par la temporalité des mandatures. Il lui arrive même de songer, en désespoir de cause, à quelque « tyrannie bienveillante ». Faut-il pour son salut, sacrifier ce que l’on a de plus cher, sa liberté et sa responsabilité ? Jonas concède toutefois la nécessité d’une « pause temporaire de la liberté » (Jonas, 2015, p. 124) en cas d’urgence climatique ou sanitaire, du genre de celle que nous avons acceptée, non sans quelques réticences, tout au long de la pandémie. 

 

 Il est possible de voir, avec Agamben (2016), dans l’état d’urgence sanitaire, une manifestation d’un bio-pouvoir visant à gérer les populations en réduisant le citoyen au simple statut d’être vivant, à sa « vie nue », et ainsi de le dépolitiser pour mieux le contrôler. Déjà Arendt (2014) décelait dans l’avènement de l’État providence et son souci paternaliste de la vie des citoyens, le déclin du politique proprement dit, dans la confusion des sphères publiques et familiales. Mais ne peut-on interpréter plus positivement les politiques sanitaires (le confinement, la préconisation des gestes barrières), comme la reconnaissance, au sein même du politique, de la valeur absolue de la vie, quoiqu’il en coûte ? En ces matières, nous suggère Jonas, il s’agit moins d’une question de liberté ou de contrainte que de responsabilité collective en faveur de la vie. 

 

Il n’en reste pas moins que le schème parental sur lequel Jonas fonde la responsabilité implique une dimension de dissymétrie, de verticalité, qui incline au paternalisme, défini comme l’intervention d’une personne ou de l’État sur la vie d’une autre personne, contre sa volonté, en vue d’améliorer sa condition ou de la protéger d’un mal (Dworkin, 1971). Protéger l’autre de cette manière, n’est-ce pas, du même coup, lui ôter toute responsabilité ? C’est évidemment ici que les deux exigences de la pensée de Jonas, celle de la survie et celle de l’existence éthique entrent dans leur tension maximale. Certes, la responsabilité parentale n’est qu’un paradigme et Jonas ne l’importe pas, telle quelle, en politique. Force est toutefois de constater qu’elle handicape toute tentative d’articulation de sa pensée à des philosophies politiques, plus ouvertement démocratiques, telles que celle d’Hannah Arendt ou encore celle de l’éthique de la discussion de Karl Otto Apel (1998), qui conçoivent la responsabilité comme co-responsabilité d’un monde commun et la politique comme délibération entre égaux (Pommier, 2012, 2013). 

 

Éducation et responsabilité

 

 Jusqu’à quel point cette conception paternaliste affecte-t-elle les implications éducatives que l’on peut tirer de l’œuvre de Jonas ? Lange et Kebaïli (2019) font état de trois modèles éducatifs possibles pour une éducation dans l’Anthropocène : a) un « modèle cumulatif », d’empilement de connaissances laissant aux individus supposés vertueux, le soin d’en tirer les implications d’action ; b) un « modèle techno-économiciste » réduisant l’agir à des technicités pratiques dont les finalités, indiscutables, s’imposeraient à tous, tels les éco-gestes; c) enfin un modèle dit « libéral » à finalité émancipatrice et donc critique, impliquant des débats argumentés, étayés par une information scientifique sérieuse. Où situer la pensée de Jonas dans ces modèles ? 

 

Le risque de paternalisme

 

La première perspective est nettement paternaliste. Dans l’imminence de la catastrophe, Jonas consent, avec l’argument du capitaine, au sacrifice provisoire de la liberté au nom de la sécurité. Du point de vue éducatif, un tel sacrifice entraînerait l’école vers des stratégies d’endoctrinement voire de conditionnement comme dans le modèle « techno-économiciste » évoqué par Lange et Kebaïli, 2019). Il s’agirait alors d’inculquer aux élèves de bonnes habitudes, de bonnes pratiques : la modération des désirs, les vertus d’économie, le respect de l’environnement, la compassion pour les espèces en voie d’extinction, les éco-gestes. Que deviendrait alors l’idéal de formation intellectuelle, d’initiation à l’esprit critique dont se réclame l’école ? L’éthique de la responsabilité peut-elle se réduire au moralisme et au politiquement correct ? 

 

Jonas évoque heureusement trois autres perspectives éducatives concernant l’éducation informelle et même l’école : la prise de conscience du public, l’outillage intellectuel de la responsabilité et la confrontation aux problèmes complexes de l’anthropocène. Ces perspectives, loin de s’opposer se complètent et se confortent au contraire. 

 

La prise de conscience

 

Jonas évoque d’abord la possibilité d’une prise de conscience des enjeux écologiques par le public. Il se pourrait en effet que les hommes finissent par tirer les « leçons » des catastrophes (Jonas, 2017, p. 39) qui ne manqueront pas de se produire, qu’elles émergent directement de l’industrie humaine (accidents nucléaires, pollutions chimiques…) ou indirectement par ses effets sur le climat (sécheresses, incendies, inondations, ouragans…). Mais Jonas met surtout son espoir dans les mouvements de jeunesse qui militent, non seulement pour les droits civiques des minorités, mais également pour le climat, même s’il pense qu’ils devraient être relayés par des institutions nationales et internationales pour porter ces revendications au niveau proprement politique (Ibid. p. 153). On songe évidemment au phénomène Greta Thumberg (2019). Il se pourrait bien, dans ce cas, que la relation éducative s’inverse et que ces soient les jeunes qui interpellent les adultes sur leur irresponsabilité. Avec l’accélération du dérèglement climatique, ce ne sont pas seulement les générations à venir qui sont concernées par les erreurs des adultes, mais les jeunes d’aujourd’hui (Fabre, 2021b). Autrement dit, les adultes ne doivent pas craindre seulement le jugement de la postérité, dans le « remords anticipateur » (Jonas, 2015, p.112), mais déjà celui de leurs enfants : « papa qu’as-tu fais toi qui savais » ? 

 

Ces formes de prise de conscience reposent sur « l’heuristique de la peur ». Mais la peur peut-elle devenir un ressort éducatif ? Corrigeons un contresens très répandu.  Chez Jonas la peur n’est pas la crainte pour sa propre vie, comme chez Hobbes. Elle concerne tout ce à quoi l’on tient dans ce qu’il a de fragile, de vulnérable. Ce n’est en rien une peur panique, qui paralyserait l’action. Jonas oppose l’anxiété, et ses conduites d’évitement, à l’angoisse, laquelle constitue, chez, lui un sentiment proactif, qui pousse à prendre ses responsabilités (Jonas, 1993 p. 300-303). L’angoisse est un sentiment rationnel qui doit nous inviter à rechercher d’où vient le danger et comment l’éviter (Jonas, 2015 p. 95). C’est même un sentiment moral, la motivation naturelle du devoir de responsabilité pour l’avenir, une « peur spirituelle » consistant « à se laisser affecter par le salut ou le malheur des générations à venir » (Jonas, 1993, p. 51). Jonas compare cette angoisse à celle que provoquait la tragédie à laquelle Aristote conférait un pouvoir cathartique. La tragédie provoque, chez le spectateur, des sentiments de crainte et de compassion. De même le prophète de malheur entend susciter « la crainte désintéressée pour ce qu’il adviendra longtemps après nous », la culpabilité pour la démesure et la sagesse des limites (Jonas, 2015, p. 112). Bref, l’heuristique de la peur n’est compréhensible que replacée dans l’éthique de la responsabilité dont elle condense d’ailleurs toutes les dimensions : heuristique (elle rend conscient du danger), déontique (elle commande de prendre soin d’autrui), rationnelle (elle introduit à la recherche des causes et des conséquences), affective (c’est la motivation du devoir), politique (elle pousse à alerter et à agir) (Sève, 1993). Entendue ainsi, la peur est liée à la prise de conscience. Elle a une dimension éducative que l’on retrouve dans les interpellations de Greta Thunberg (2019). 

 

Enseigner les savoirs de l’anthropocène

 

La deuxième perspective éducative ouverte par Jonas, concerne l’enseignement des savoirs de l’anthropocène. Étant donné le développement de la techno-science d’une part et ce que l’on sait d’autre part de la complexité des interactions homme-nature, il est devenu nécessaire d’outiller intellectuellement l’éthique de la responsabilité qui ne peut faire fond sur la simple conscience morale, comme c’était le cas dans les morales classiques. Désormais, « un lien très proche entre la réflexion éthique et le savoir de la science est devenu nécessaire » (Jonas, 2017, p. 75). S’il s’agit désormais, non plus seulement de sonder l’intention, mais d’anticiper les conséquences des actions, les décisions exigent la prévision « sur la base d’un savoir analytique des causes » (Jonas, 1993, p. 158). Or, nous sommes certes plus armés que les hommes du passé grâce à la prospective, mais moins également à cause du dynamisme des sociétés modernes, de leur changement perpétuel et même de leur accélération. Le fait est « que nous devons toujours compter avec du nouveau, sans pouvoir le calculer, que la transformation est certaine, mais non ce qui sera différent » (Ibid. p. 167). Un tel savoir concerne la connaissance du fonctionnement des systèmes complexes, qu’ils soient naturels, techniques ou imbriqués les uns dans les autres et celle de leurs seuils critiques au-delà desquels ils deviennent incontrôlables. 

 

Bien que Jonas songe ici à l’action de l’homme d’État, on peut aisément transposer son analyse en pensant aux responsabilités que les citoyens des démocraties devront désormais assumer dans leur action politique, sociale ou professionnelle. Dès lors se pose la question d’une éducation au temps de l’anthropocène et dans l’éventualité de la catastrophe (Wallenhorst et Pierron, 2019). Jonas lui assigne deux objectifs : 1) élaborer les connaissances « de ce qui convient et de ce qui ne convient pas, de ce qu’il faut admettre et de ce qu’il faut éviter » ; 2) « maximiser la connaissance des conséquences de notre agir » ; (Jonas, 2015, p. 92-93). Ici, il ne s’agit plus de moralisme paternaliste, mais d’une éthique articulée à une culture scientifique. 

 

Les problèmes pernicieux

 

La troisième perspective prend en compte le fait que cette responsabilité intellectuellement outillée doit pouvoir traiter les problèmes complexes de l’Anthropocène. De tels problèmes qui ne sont pas seulement techniques, mais également sociaux et politiques, si bien que « le nombre des inconnues s’accroît à proportion de l’inventaire des grandeurs connues » (Jonas, 1993, p. 158). Étant donné la dynamique des systèmes et l’enchevêtrement de la nature et de la technique, plus s’accroît la connaissance de l’objet et plus celui-ci se dérobe. D’où « une étrange course de compétition entre le savoir et le mouvement propre de l’objet » (Ibid.). En fait, les problèmes que pose l’Anthropocène sont entièrement nouveaux. Jonas les compare à ceux de l’évolution naturelle des êtres vivants. L’évolution travaille par essais et erreurs sur des détails du phénomène de la vie, petit à petit, sans jamais jouer son va-tout et en éliminant ses ratés par la sélection naturelle. Au contraire, le processus technique est un phénomène : 1) planifié et non au hasard, c’est-à-dire centré sur le court terme tout en engageant le long terme ; 2) global, mettant en danger non tel ou tel détail  de l’organisme, mais bien la vie elle-même ; 3) rapide, ce qui rend malaisée la correction des erreurs qui s’avèrent d’ailleurs souvent irréversibles ; 4) inamendable, la possibilité d’infléchir le processus diminue au fur et à mesure que le temps passe. Dans ce cas, le kairos, le moment opportun de l’action prudente, se situe en amont. D’où, comme le dit Jonas, « l’obligation de veiller aux commencements » (Ibid. p. 56). 

 

La manière dont Jonas caractérise les problèmes de l’Anthropocène rejoint la théorie des « Wickled problems », des « problèmes pernicieux » (Rittel et Webber, 1973), élaborée par la philosophie américaine du management dans les années 1970. Ces problèmes sont dits « pernicieux », car : a) ils ne peuvent pas être convenablement construits et ils ne peuvent donc pas avoir de véritables solutions, mais seulement des issues précaires et provisoires bien qu’il n’y ait pas de critères pour évaluer la pertinence de ces issues ; b) ici, on n’a pas affaire à un problème isolé, mais à un nœud de problèmes, de sorte que trouver une issue à un problème P1 entraîne des effets peu prévisibles et fait naître ailleurs d’autres problèmes P2, P3, P4… que l’on ne pouvait anticiper ; c) ces problèmes sont à ce point contextualisés, uniques, qu’on ne peut transférer de leçons de l’un à l’autre (Fabre, 2021a). 

 

Jonas avait bien compris le caractère pernicieux de ces problèmes. Tout essai pour corriger les impacts technologiques néfastes – remarquait-il – implique lui-même de nouveaux risques : « Éloigner le danger est ainsi une tâche permanente, dont l’accomplissement est condamné à demeurer un ouvrage décousu et souvent même un ouvrage de rapiéçage (Jonas, 2017, p. 192). 

 

Les problèmes pernicieux sont ceux d’un monde radicalement problématique, tel que le pense Jonas. Il n’est pas étonnant qu’ils soient familiers aux collapsologues (Servigne et Stevens, 2015), comme aux catastrophistes éclairés (Dupuy, 2002 ; Vargas, 2018). L’humanité ne se pose que les problèmes qu’elle peut résoudre, disait Marx. Encore faut-il être à la hauteur de ces problèmes. Il s’agit bien évidemment de savoir si l’école, à l’âge de l’Anthropocène, peut prendre en compte l’initiation à ce genre de problèmes et comment elle peut le faire. Outiller la responsabilité du citoyen est sans doute la seule alternative à la technocratie et au paternalisme éducatif et politique. 

 

Conclusion

 

Jonas tente d’édifier une éthique de la responsabilité prenant en compte non seulement la question de la survie des êtres humains, mais celle de l’idée d’humanité, dans un kantisme rénové avec une interprétation conséquentialiste des impératifs catégoriques. Pour fonder ces nouveaux impératifs, il articule une ontologie de la vie inscrivant le bien au cœur de l’être à une éthique de la sollicitude parentale. Il s’agit là d’une tentative qui brave les interdits kantiens de la métaphysique et la loi de Hume et de ce fait, prête à discussions.  Même si l’on n’accepte pas de suivre Jonas dans toutes ces audaces métaphysiques, on peut lui reconnaître le mérite de penser radicalement la problématicité du monde, problématicité à la fois épistémologique, éthique et ontologique. C’est ce qui fait toute son actualité, mais qui, en même temps, expose sa pensée à bien des incompréhensions et contresens. Il est vrai que celle-ci est traversée de nombreuses tensions dont on a vu les implications politiques et éducatives. Jonas en est si conscient qu’il assigne pour tâche à la philosophie de tenter de les résoudre. La philosophie doit « veiller à ce que les mesures à l’aide desquelles on cherche à arrêter le malheur soient humaines, car ces mesures pourraient être telles qu’elles envoient au diable ce qu’on veut précisément sauver (Jonas, 2017, p. 152). 

 

Même si l’on n’accepte pas toutes les réponses que propose Jonas, il reste que les questions qu’il pose sont désormais les nôtres. C’est particulièrement vrai des alternatives éducatives que l’on peut tirer des lignes de force de sa pensée dans l’horizon d’une éthique de la responsabilité intellectuellement outillée. L’éducateur doit-il désespérer devant l’ampleur de la tâche ? Mais l’espoir ou le désespoir font partie du problème et renvoient à notre responsabilité. Comme le dit Jonas : 

 

« Renoncer à tout espoir ne peut que précipiter le désastre, tandis que l’un des éléments susceptibles de le retarder consiste à croire qu’il peut être conjuré » (Jonas, 2017. p. 54). 

 

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Annuel de la recherche en philosophie de l’éducation ISSN 2779-5292