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jeudi 30 octobre 2025
Pour citer ce texte : THEODOROPOULOU, E. (2025). Philosophie de l’éducation en praxis : un « pas moi » ( ?) parcours Annuel de la Recherche en Philosophie de l’Education , hors série n°1 ,
[https://www.sofphied.org/annuel-de-la-recherche-en-philosophie-de-l-education/arphe-hors-serie-no1-jeunes-chercheur-e-s/itineraires-de-recherche-en-philosophie-de-l-education/article/philosophie-de-l-education-en-praxis-un-pas-moi-parcours]
Philosophie de l’éducation en praxis : un « pas moi » ( ?)
parcours
Elena Theodoropoulou
Université de l’Egée,
Laboratoire de Recherche en Philosophie Pratique
(L.R.Ph.P.)
Résumé : L’entrée dans la philosophie de l’éducation, sa saisie et traversée sont ici comprises comme des mouvements qui inaugurent et scandent un parcours possible vers la philosophie pratique. Se révèlent alors tant les tourments de l’acquisition d’un regard de philosophie de l’éducation que les difficultés de frayer un chemin qui mettra au clair les vicissitudes d’une approche pratique de la philosophie, sans pour autant la dénigrer ou l’annuler. Ce parcours personnel intègre tant le réquisit disciplinaire et institutionnel que l’envie de devenir le/la philosophe qui porte et assume sa conception de la philosophie en praxis. La philosophie pratique devient ainsi une perspective pour la philosophie de l’éducation, au fur et à mesure que les deux espaces s’interpénètrent en mettant au clair le défi que la pratique constitue pour la philosophie et les philosophes.
Mots-clés : philosophie de l’éducation, philosophie pratique, praxis
Abstract : The entry into philosophy of education, its seizure and traversal, are understood here as movements that inaugurate and mark out a possible path towards practical philosophy that reveals both the torments of acquiring a philosophical view of education and the difficulties of clearing a path that will make clear the vicissitudes of a practical approach to philosophy without denigrating or cancelling it. This path integrates both the disciplinary and institutional requirements and the desire to become the philosopher who brings his or her perception of philosophy into praxis. Practical philosophy thus becomes a perspective for the philosophy of education, but at the same time the two spaces interpenetrate, making clear the challenge that practice constitutes for philosophy and philosophers.
Keywords : philosophy of education, practical philosophy, praxis
[…] aye, there's the rub …
William Shakespeare, Hamlet
That is not it at all,
That is not what I meant, at all
T.S. Eliot, "The Love Song of J. Alfred Prufrock"
Le départ : le sol vacillant d’une discipline nébuleuse
Si dans cet article, la question est de mettre au clair le sens d’un parcours académique personnel au sein de la philosophie de l’éducation et par rapport à elle, je dois confessé que tout a commencé par une perplexité concernant la définition possible de ce que pourrait être la philosophie de l’éducation. Le fait même de se poser d’emblée cette question indique une incertitude et une ambivalence de fond, qui rendent précaires tant le statut que la contribution d’un tel poste au travail académique. Ce doute traduisait plutôt un embarras institutionnel et épistémologique: probablement parce ce que la philosophie de l’éducation, dans l’université grecque des années 2000, n’était pas encore bien intégrée dans les curricula des départements, à cause d’une nébulosité enveloppant son rôle et sa nécessité, ce qui n’a malheureusement pas encore changé1 à ce jour.
Ainsi, la question banale et récurrente portant sur l’utilité de la philosophie semble souvent concerner davantage la philosophie de l’éducation. Cela pourrait certainement se justifier si la discussion concernant son rôle et son travail spécifique avait un certain intérêt épistémologique, ou suscitait l’envie réelle de cerner ses limites et de protéger son espace dans l’université, en vue de préciser et d’assurer les profits de son introduction dans le curriculum, et si l’inclusion quelconque de cette discipline-ancilla ne servait pas, le plus souvent, de complément à d’autres disciplines ”prestigieuses” et autonomes, ou encore ne fonctionnait pas comme une sorte d’adjectif’, de surplus qui conviendrait à la stratégie curriculaire des départements concernés. Ironiquement, si les philosophes de l’éducation n’ont pas encore bu la ciguë2 , ce serait semble-t-il parce que leurs discours ne produisent pas le scandale nécessaire, cette différence qui troublerait d’une certaine manière les convictions plus ou moins établies de la société éducative ou philosophique. Un complexe de conditions restrictives, de préjugés, d’obsessions, d’interprétations non élaborées par rapport à la présence de la philosophie dans les départements des sciences de l’éducation – lesquelles, traditionnellement accueillent la philosophie de l’éducation – nourrissent encore le sentiment de mise à l’écart et de marginalisation. «Ce quelque chose qui s’appelle “philosophie de l’éducation”» (Wain, 2006)3 aurait besoin de lutter afin de se constituer comme un champ disciplinaire distinct, afin de gagner le droit d’autodétermination et d’autojustification, surtout en tant que ”double témoin” par rapport à deux groupes cardinaux entrant en relation dans cette lutte étrange : des philosophes (dans la mesure où la philosophie de l’éducation est philosophie) et des enseignants/es (dans la mesure où la philosophie de l’éducation construit des rapports fondamentaux avec l’éducation). Malgré la défense forte et précoce de la philosophie dans les lieux de l’éducation de la part d’un penseur socialement avisé, comme c’est le cas de John Dewey (une défense paradoxalement prophétique envers les tendances actuelles de ”déphilosophisation” de l’éducation), la philosophie de l’éducation, une branche secondaire, ou, selon une formulation ambiguë, une branche appliquée de la philosophie, n’évite pas de subir en double les secousses des pressions persistantes découlant des résultats de la recherche éducative ressassant l’objectif de l’innovation – ce que paraît-il la philosophie de l’éducation n’est pas prête (du moins sans objections) à suivre. L’émergence, la constitution, l’institutionnalisation et la professionnalisation du champ de la philosophie de l’éducation sont comprises comme un phénomène précis approprié à l’histoire et à la culture des sociétés occidentales du XXe siècle, en fonction du développement, d’une part de la philosophie elle‐même dans le cadre de ces sociétés, bien que différemment dans chaque espace national, d’autre part de l’évolution de la science pédagogique, des sciences de l’éducation ainsi que du contexte sociopolitique et économique (v. Chambliss, 1996).
Telle étant la situation, je commençais à réaliser qu’enseigner la philosophie de l’éducation n’était surtout pas une affaire de constitution du contenu d’une discipline – soit d’une discipline apparemment vague, controversée, métis, “en l’air”– mais, essentiellement et par excellence l’histoire d’une survie ; il s’agissait de devenir capable de défendre (et comprendre) une telle discipline en doublant son parcours par mon propre parcours, ce qui signifiait du moins qu’on devrait devenir tolérant à l’ambigüité etau mouvement double d’une scission/fusion qui désormais affecterait ma position même par rapport à la philosophie, voire la manière d’être philosophe. Or la philosophie de l’éducation devenait progressivement, d’une part l’agrafe me reliant à un département des sciences de l’éducation (telle un alibi) et d’autre part le tremplin pour me re-jeter dans la philosophie ou le filtre à travers lequel la philosophie serait vécue, cette fois-ci, comme une question, une voie pour que je saisisse les conditions de sa possibilité dans son rapport avec ce qui pourrait être « l'expérience de l'événement en tant qu'elle dérange la distinction entre le possible et l'impossible » 4 .
En tout cas, la possibilité d’une description absolument cohérente d’un espace disciplinaire comme celui de la philosophie de l’éducation, toujours en mouvement (tant sur le plan des objectifs que sur celui des méthodes et des domaines de recherche), , est d’emblée ardue et constitue un vrai défi5 . On constate plutôt des tendances convergentes au niveau mondial, qui, à certaines périodes, donnent des descriptions plus ou moins convergentes, mais la difficulté à élaborer une conception universelle et définitive de ce qui peut être considéré, aujourd’hui, comme étant la philosophie de l’éducation, semble, non seulement conduire à plaider pour une faiblesse épistémologique, mais de plus à introduire le soupçon fondamental (bien que généreusement mis en doute): « il ne peut plus pour longtemps encore exister de doute sérieux qu’il existe quelque chose comme une philosophie de l’éducation » (Warnock, 1977, 9). Paradoxalement pourtant, ce ”quelque chose” tire sa force singulière de cette indétermination et de cette polyglossie et qui est plus, de cette double attirance/répulsion inexorable entre philosophie et éducation. D’autre part, contre l’idée deweyenne sur le rapport, par nature obligatoire (en raison en outre de la définition même de la philosophie proposée par Dewey) entre philosophie et éducation, la seule solution possible pour la philosophie de l’éducation, afin qu’elle puisse sortir de son isolement et cesser d’être une voix inaudible, est sa re-connexion constante avec la philosophie (v. Siegel, 2002)6 , malgré les secousses que crée son introduction dans des départements des sciences de l’éducation. De plus, la prétention à une nécessité d’appropriation de la compréhension philosophique des concepts au sein des sciences de l’éducation rend également nécessaire la formation d’un discours intermédiaire qui prendrait en charge ces secousses indésirables (ou qui mettrait au clair leur éventualité), une fois que la philosophie pénètre et saisit l’éducation ; à l’inverse, il est tout autant nécessaire que ce discours maintienne l’exigence d’une réflexivité intense7 . Cette relation entre les deux champs oblige la philosophie de l’éducation à devenir un dispositif relationnel critique et réflexif ; mais chaque philosophe de l’éducation devrait assumer cette relation fondamentale, selon sa culture philosophique et pédagogique, ses positions, ses choix, son histoire, au-delà même de tout effort espéré d’harmonisation, de réconciliation, d’équilibration, de concertations, de consensus. La question de la nécessité et de la spécificité de la philosophie en éducation (et vice versa) constitue déjà un enjeu difficile pour la constitution et l’évolution de la philosophie de l’éducation elle‐même.
Essayer de se situer en tant que philosophe de l'éducation dans l’espace universitaire grec à l'époque, signifiait qu'on devait assumer et analyser au moins trois conditions : institutionnelle (identifier et situer la philosophie de l’éducation dans l'espace académique grec), disciplinaire (situer la philosophie de l’éducation dans le cadre d'un département de sciences de l'éducation), épistémologique (saisir son apport unique et identifier ses approches distinctives, créant ainsi une certaine identité). Ces trois conditions, d'une part, situent la question dans un espace national spécifique par rapport à la construction du système éducatif et académique dans lequel la philosophie vient se placer, d'autre part, soulèvent nécessairement la question de la relation entre philosophie et pédagogie que la philosophie de l’éducation doit garder vivante au sein de circonstances spécifiques. Le fait que par rapport à ces trois conditions la situation de la philosophie de l’éducation était (et continue d’’être) précaire, le sentiment de l’entrée et de l’installation dans un espace flou et limité, où rien ne peut rendre sa voix suffisamment claire et stable en sorte qu'elle puisse revendiquer sa position et son rôle dans les développements qui concernent à la fois la philosophie et les sciences de l'éducation, ont mené, presqu’inévitablement, au désir d’approfondissement et d’exploration des soubassements, dans le but de saisir les complexités et les conséquences de cet état de fait qui semble faire de la philosophie de l’éducation un champ ”forgé par lui-même”, “auto-proclamé”.
L'entaille de la philosophie de l'éducation
Si la philosophie de l’éducation doit s’interroger sur l’identité que les propriétés des deux domaines disciplinaires auxquelles elle renvoie tendent à lui attribuer, si elle doit se soucie de garder sa consistance au fur et à mesure qu’elle traverse les matériaux transportés dans son lit, un lit par ailleurs en principe acquis- devenir la ”troisième voix”, la ”troisième pensée”, penser son impensé-réfléchir sur l’hybridité, cette ambition ne saurait s’épuiser dans une transcription réfléchie du donné – mais restée éblouie et pétrifiée par le problème de ses limites indociles ne pourrait pas lui permettre d’exprimer ses potentialités. Il s’agit pour elle plutôt de convertir l’acquis, ce qui lui est légué, transmis par ces deux sources, se tracer comme une entaille, une greffe. Car d’une part son origine et sa nature philosophique ne sont pas, semble-t-il, clairement admises, mises au clair et développées dans tous les environnements académiques (du moins pas de la même manière, différemment aussi selon la position de la philosophie dans les divers systèmes éducatifs) tandis que d’autre part le rapport entre philosophie et science de l’éducation/pédagogie, au sein de la philosophie de l’éducation elle-même, devient complexe et profondément ambigu, en raison du rapport singulier de l’acte philosophique avec l’enseignement, en raison également de la formation systématique et institutionnelle de la personne. Cette difficulté inhérente crée pour la philosophie de l’éducation à la fois une hésitation et l’envie d’une décision plus ou moins urgente par rapport à la nécessité de se circonscire son identité, d’afficher d manières d’exister singulières et un chemin distinct approprié à ses mouvements. L’effort paraît pénible et délicat – au fur et à mesure, elle semble perdre ses attaches théoriques et pratiques, tandis que son rattachement à la personne du/de la philosophe de l’éducation pour ainsi expliquer ses choix semble souvent inévitable. Cette présence-absence hétérotopique dans les sciences de l’éducation, dans l’éducation ainsi que dans la philosophie même, cette lutte acharnée pour gagner à tout instant le pain de son identité, son lien intérieur, ontologique avec l’altérité, l’énigme de son origine et de son histoire (l’acception simpliste bien que correcte que la philosophie de l’éducation analyse philosophiquement le phénomène de l’éducation et les questions éducatives ne suffit pas à la satisfaire), ses carrefours, ses croisements, les interpénétrations, les oscillations et la pluralité des tensions entre le théorique et le pratique et leurs connections se multipliant, attachant la philosophie de l’éducation à un travail étrange de tisserand œuvrant sur un tissu de plus en plus dense et fin qui se tisse et se détisse entre les aspects labyrinthiques de l’approche de la philosophie vers la pédagogie et vice versa, tout cela a préoccupé profondément mes recherches de cette période8 .
L'écriture du livre sous le titre L'entaille de la philosophie de l'éducation : Introduction à (2003) procède de ce point de vue critique, et elle reflète tous ces heurts et blocages à travers des choix spécifiques qui essayent de transmettre la tonalité de cette situation faite à la philosophie de l’éducation, de penser la philosophie de l’éducation comme une exigence philosophique en mouvement, plutôt que comme une discipline revendiquant ses droits dans l’université. Or, de ce point de vue, cette écriture s'est développée comme un geste, un projet et un style qui seraient appropriés à la philosophie de l’éducation, à mesure qu’elle tend à réfléchir sur elle-même, en activant au moins trois leviers : d’une part un levier conceptuel (l’entaille), et un levier stylistique pour les éléments para- textuels : (le Pas moi beckettien en tant qu’exergue de début et exergue final et la photographie d'une rue de campagne vide, sinueuse, bordée de champs, à la fin du texte) ; d’autre part, un levier méthodologique, comme le traitement de l’élément de la note non pas comme une note de bas de page mais comme une note interne et intertextuelle, intervenant dans le flux de la syntaxe du texte à la fois en l'interrompant et en y créant de multiples intersections et mises-en-abîme ; telle un dialogue de l’auteure à la fois avec elle-même, avec le texte ainsi qu’avec le/la lecteur/trice, essayant d’introduire des éléments de réflexion, de clarification, de précision, d’information, d’interprétation, de contextualisation, de dramatisation même de ce qui précède ou suit – comme une parenthèse non parenthétique le texte continuant désormais avec et sans la note - dès lors, ce texte devient à la fois unifié et stéréométrique. C’est comme si la philosophie de l’éducation était un texte écrit à la fois par elle-même et par d’autres auteurs, avec ses propres chemins, mais inéluctablement coupés par d’autres chemins tracés par d’autres pas – c’est un matériel riche qu’elle crée, met au clair et qu’elle s’approprie, tandis que ce genre de note lui permet de le déployer tant comme une histoire que comme un raisonnement. Bref, ces trois leviers d’une part servent de commentaire à l’effort de définir la philosophie de l’éducation et son espace ; et d’autre part préconisent l'entrée ultérieure dans la Philosophie pratique, au fur et à mesure qu’ils impliquent l'existence d’éléments structurels et méthodologiques, tels que je les ai perçus par la suite : comme par exemple, la dynamique du seuil, la fonction du détail, le développement du tact (Théodoropoulou, 2016), l’organisation de l'échafaudage, la saisie de l’émergence (v. Theodoropoulou, 2024c). Ces trois éléments semblaient cependant fonctionner de manière hérétique dans le contexte de cette tentative initiale de parler de ”philosophie de l'éducation”, puisque, dans un paysage bibliographique relativement pauvre à ce sujet en Grèce à l’époque, L'entaille (étant scandaleusement la philosophie de l'éducation), n’avait pas pour intérêt principal la transmission des connaissances propres à cette discipline Par contre, ce livre avait plutôt essayé de traverser les fissures, les ”incriticités”, les coutures de la référence complaisante et paraît-il facile, voire naïve, à ce champ disciplinaire, une référence le dénuant finalement de toute force d’intervention et d’autosuffisance faisant de la philosophie de l’éducation plutôt un dispositif avisé de commentaire général, une source encyclopédique philosophique, un outil herméneutique ou une remarque plus ou moins littéraire, selon le cas. Or L’entaille essayait plutôt d’identifier les traces et les murmures, comprendre la formation de cette grille conceptuelle qui rendrait intelligible la manière dont la philosophie de l'éducation se ‘tient’ et s'articule comme discours dans le champ de la philosophie et des sciences de l'éducation. Plus encore, la reconnaître comme un objet qui pense et se déplace en ouvrant des espaces et en déployant des actions, donc un sujet-objet particulier qui ne reste pas inactif entre les mains des philosophes de l'éducation, mais qui perçoit, assume et définit ses voies en leur résistant mais tout aussi bien en les accompagnant de près leur devenant ainsi un mode d’existence et une manière de voir le monde9 . C’est en ce sens que L’entaille inaugure la conception de la philosophie de l'éducation dans la pratique. Ainsi, l'ouverture et la fermeture du livre, avec le délire de la bouche ouverte beckettienne, élèvent la discipline hors de l'obscurité de la scène, le dépouillent de sa véritable nature et lui donnent la texture à la fois d’un sujet et d’un objet philosophique météorique qui retrace ses sources et ses débouchés en traçant les lignes de son histoire en tout temps et en tout lieu. En effet, la référence à un Pas Moi, avant et après un texte sur la Philosophie de l'éducation (faisant ainsi de ce texte une parenthèse, une tentative de saisir un sujet qui peut dire « je » ou s'identifier), tend ludiquement à miner, voire nier, à la fois le texte lui-même et ce qu'il veut dire, à la fois le sujet qui l'écrit et sa croyance en ce qu'il écrit. Il s'agit d'un recul au moment où l'on progresse, d'un brouillage, voire d'une dérobade ou d'une sortie : un ‘sortez-moi’ d’ici, de cet impossible.
Il semble qu'une sorte d'insouciance élaborée (qui pourrait devenir une manière d'être sans effort) croise parfois cette présence fugace de la philosophie de l’éducation - une sprezzatura qui pourrait se référer à sa capacité à ce que «tout ce qu'elle dit ou fait, semble non-contrôlé et sans effort»10 , parce que son discours ne montrerait pas les coutures, l'effort pour inclure, intégralement, ses deux dimensions (principalement à l'arrière-plan développant ses voies et ses effets quelconques : une fois (considérée) comme philosophie et une autre fois (considérée) comme pédagogie/science de l'éducation), sans les étouffer sous l’exigence de les combiner. Sprezzatura donc à cause des bords effacés, d'une visibilité mesurée et d’une volonté de produire des effets11 . La philosophie qu’est la philosophie de l'éducation , joue mortellement avec ce qui n'est pas, mais se charge de l'inclure en trouvant le moyen de le comprendre mais d’une manière qui ne trahirait aucune difficulté, voire d’une manière ”naturelle”. La philosophie de l'éducation est formée, par sa vie institutionnelle, à être une philosophie hésitante, tranquille et modérée et, de la même manière, une science de l'éducation excentrique.
Désormais, la réflexion sur la philosophie de l’éducation devient presque nécessairement un parcours vers la philosophie pratique qui va être considérée soit comme provenant des viscères de la philosophie de l’éducation soit comme une projection, une lancée nécessaire, dont la philosophie de l’éducation ne saurait faire l’économie12 . En fait, ce que la philosophie pratique hérite de la philosophie de l’éducation est d’une part ce devoir d’exister en philosophe dans des environnements non-philosophiques13 et d’autre part la responsabilité que l’éducation porte en elle-même à l’égard du monde – une certaine obligation inéluctable qui pousse la philosophie hors d’elle-même dans une aventure qui la dépasse et l’interpelle. Or du point de vue d’une compréhension possible de la provenance de la demande pour une philosophie pratique, la philosophie de l’éducation a joué un rôle crucial, car sa traversée a mis au clair l’élément praxique comme un tremplin pour la réflexion sur la philosophie en fonction d’une condition singulière, voire un réquisit, qui est son rapport, inné et externe, inexorable et acquis, avec l’éducation.
L’émergence du prat(x)ique
La philosophie de l'éducation est-elle une intensité praxéologique, capable de surmonter la conception d'un gouffre inhérent entre la théorie et la praxis ? Est-il possible que cette conception génère des attentes (ou des accusations), des stéréotypes concernant sa présence spectrale (sa quasi-présence ou sa représentation de la présence) dans les espaces éducatifs mais aussi son faible rôle sur le plan institutionnel?
Ou, en même temps, est-il possible que cette conception formule la nécessité d'une réappropriation du philosophique et de son rétablissement dans le vital, dans ce qui se passe à chaque instant ? La philosophie de l'éducation, dans la mesure où sa propre substance est attachée à un lieu-limite témoignant des multiples et nécessaires enroulements de la théorie dans la praxis et la pratique (et vice versa), ne peut pas ne pas se refléter dans la reconnaissance active de son propre mouvement interrogatif entre le concept et le vécu. Mouvement interrogatif parce qu'il se pose constamment la question du rapport entre les dimensions théorique et pratique, et du sens de la praxis, notamment dans la mesure où ce rapport et ce sens semblent pousser la philosophie de l'éducation vers son implication et son intervention dans ce qui arrive - interpellations qui émergent constamment des méandres de la rencontre avec la réalité éducative. Mais en même temps, ce sont des interpellations constantes - c'est ainsi que la philosophie de l’éducation insiste pour construire sa coexistence, sa communauté même avec l'éducation, comme un problème14 . D'autre part, cette dimension de questionnement persistant associe l'acte philosophique à la philosophe elle-même ou au philosophe lui-même, dans une exigence singulière d'incarnation, en clarifiant également la question de la capacité empathique de cet acte philosophique, l'expérience éducative investissant systématiquement dans l'urgence de former des synergies, des concordances, des harmonisations, des réponses, des relations15 .
Deux gestes d’institution/fondation dont j’ai pensé que je devais prendre la décision deviennent significatifs de ce point de vue, à savoir de se forger une position de plus en plus claire vis-à-vis de ce genre d’interpellations, installant désormais mon orientation vers la philosophie pratique du fond de la réflexion sur la philosophie de l’éducation. Le plus intéressant est que ces gestes à la fois installent dans la marge et désinstallent de la marge l’exigence philosophique, constituent une émergence du philosophique là où il n’existe pas(absence et carence du philosophique dans les départements d’éducation):
1. 2012. Fondation du Réseau de Philosophie de l’Education en Praxis (RePhEdenPrax)16 .
Ce réseau a été mis en place dans le but d'organiser un cadre de recherche qui, à travers la singularité de la philosophie de l'éducation (dans la mesure où elle pose impérativement la question du sens de la praxis en éducation ou de l'éducation comme praxis à tous les niveaux), posera également la question de l'éducation comme question cruciale pour la philosophie. Plus spécifiquement, la recherche porte sur les manières dont la philosophie de l'éducation s'implique dans la praxis en interrogeant, dans leur multiplicité et leur variété, les pratiques et les actions qui sont fréquemment ignorées par la philosophie de l'éducation institutionnalisée. Le réseau s'intéresse au développement et à l'étude d'une perspective qui mettrait en évidence la complexité de la dimension pédagogique de la philosophie. Ιl souhaite donc se concentrer sur la problématisation, l'approfondissement et la provocation de l'expérience praxéologique, ainsi que sur l'émergence de sites expérimentaux en philosophie de l'éducation à travers ses représentations, ses herméneutiques et ses développements dans le contexte d'espaces culturels et sociopolitiques contemporains pluriels. La première phase de création du Réseau (2011-2017) a permis de préparer la création du Laboratoire de Recherche en Philosophie Pratique (L.R.Ph.P.) en lui donnant certaines de ses orientations fondamentales, comme l'accent mis sur la structure des ateliers en tant que structure par excellence liée à la praxis17 .
2. 2015 : Fondation du Laboratoire de Recherche en Philosophie Pratique et Appliquée
Ce Laboratoire avait pour objectif de tirer au clair la philosophie pratique d’une part comme un champ important de la philosophie à explorer et d’autre part comme un champ de questionnements philosophiques singuliers, d’expérimentation, d’interdisciplinarité et d’interculturel ; de retracer et d'élaborer les questions associées à l'émergence, la reconstruction, le tissage, la (re)présentation, la performance, des formes de pensée et de praxis philosophiques dans leur rencontre avec des environnements éducatifs pluriels. En fait c’est le premier pas pour rendre visible le besoin de poser une telle thématique de recherche et du coup rendre visible la demande philosophique, en premier lieu institutionnellement, au sein des Sciences de l’Education, comme une demande de base.
Cependant, la dimension ”appliquée” était plutôt perçue comme faisant partie de la philosophie pratique, du discours pratique, et non pas comme un processus déconnecté de la recherche philosophique, qui tendrait plutôt à mettre l'accent sur la résolution de problèmes et la formulation de plans de solution ayant une valeur généralisable dans des cas similaires. L'application elle-même devrait être posée comme une question, notamment philosophique, qui pousse à comprendre le sens et la valeur de l'agentivité en tant que volonté multiforme et ”multiniveau” de façonner le monde. Il s'agirait donc d'une interrogation systématique des conditions sur la base desquelles une éthique de la recherche appliquée est formée, des obligations qu'elle implique, des complications, des solutions, des critères auxquels un environnement d'action doit répondre pour devenir un objet de théorisation. Or ce qui nous intéresserait ici, ce serait de concevoir les fondements de l'application dans le contexte d'une méta-éthique, dans la mesure où cette dernière interroge les conditions sur la base desquelles il est possible pour le concept d’application d'être traité par rapport au type d'obligation et de décision auquel il se réfère et à ce que l'on peut attendre d'une éthique de la recherche appliquée. Le malentendu ou la perspective probablement tordue que cette notion d’”appliqué” créait comme partie du nom du Laboratoire, a mené progressivement à la décision de le renommer
La consolidation de cette orientation vers la pensée du pratique va se faire par deux gestes complémentaires mais tout autant significatifs :
3. L’initialisation (en 2018) de la Biennale Internationale en Philosophie Pratique18
Dans le cadre du mentionné ci-dessus Laboratoire, la recherche philosophique est développée comme une pratique qui permet de franchir les frontières, de dépasser l'établi, de créer des hétérotopies, de nouvelles articulations et constructions, un espace de pensée vitale, de prise en charge interculturelle19 . Sur cette base, l'ambition d'une telle initiation serait d'explorer le concept et la fonction de la philosophie pratique aujourd'hui, en mettant l'accent sur sa dynamique interculturelle, anthropologique et sociale selon quatre axes : esthétique, éthique, éducatif et politique. Formuler la question de ce que pourrait être la philosophie pratique de manière de plus en plus systématique, c'est-à-dire mettre en évidence les différents angles et accès à cette question ou à sa contestation, voire à l'existence même de (la) philosophie pratique, ne peut que convertir in fine la question en une réflexion sur la tentative de la faire exister et, potentiellement, en un indice de l'intérêt croissant qu'elle suscite.
Le geste philosophique se trouve toujours à l’arrière-plan, comme portant sur lui le symbolique et le réel, le théorique et le pratique, l'abstrait et le concret, le littéral et le métaphorique, le corporel mais aussi l'au-delà en amont et en aval du corporel. L'existence d'une dimension institutionnelle, tantôt implicite, tantôt explicite, de la philosophie et de ses pratiques ou, mieux encore, les efforts/actes implicites ou explicites de son institutionnalisation mettent en évidence un niveau supplémentaire de réflexion sur la présence de la philosophie aujourd'hui, bien que la référence à la qualité pratique de celle-ci crée également de nouvelles complications, puisque les environnements dans lesquels nous sommes invité.es à percevoir la philosophie, et éventuellement à la redéfinir, semblent tantôt la comprimer, tantôt la disperser, en lui faisant perdre son centre de gravité. Ainsi, la Biennale devient peu à peu un geste interrogatif, subversif et stimulant au fur et à mesure que les entrées et les sorties se multiplient, les zones mixtes et floues semblent plus intenses, c'est-à-dire qu'il devient encore plus clair que, d'une part, se pose la question de l'identité de l'acte philosophique et que, d'autre part, se pose la question de la distinction de ce qui peut être reconnu comme pratique, encore davantage si cette caractéristique est considérée plus ou moins comme affaiblissant le philosophique ou, inversement, comme intensifiant la perception de l'acte de philosopher, au risque même de désintégrer la densité supposée d'un objet tel que la philosophie pratique. Le défi qui progressivement s’ajoute aux éditions de la Biennale concerne son intention ou son invitation faite aux philosophes d’affronter, voir, de participer, de réagir, bouger, sentir, observer, écouter, traverser les choses afin de découvrir la philosophie (?) de différentes manières, à nouveau dans le jeu du monde. Le corps y est invité à se déplacer dans des environnements polyvalents créant parfois l’effet d’un funambulisme, tandis que le tiraillement entre le corps et ses dis(ap)paritions reste le scandale et l'aventure de la philosophie pratique, qui a besoin d'avoir des interlocuteurs, d'oser l'errance. En parallèle, la libération de l'élément collaboratif et interactif crée de nouveaux mouvements et gestes, de nouveaux espaces et concepts, de nouveaux milieux et projets en investissant davantage dans l'effet déstabilisant et déterritorialisant de la philosophie pratique, alors que cette dernière peine à établir quelque chose comme une trace.
4. 2019: Renommage du « Laboratoire de Recherche en Philosophie Pratique et Αppliquée » devenant désormais : Laboratoire de Recherche en Philosophie Pratique
L'objectif du Laboratoire demeure la recherche des concepts et des formes de la philosophie pratique dans les espaces académiques et sociopolitiques contemporains en utilisant une approche expérimentale, critique et dialogique et en mettant l'accent sur des questions complexes (éthiques, politiques, anthropologiques, esthétiques, interculturelles, écologiques, etc.). Le présupposé de base d'un tel effort, et en même temps un engagement envers ses effets, est l'hypothèse que la philosophie pratique, en tant que philosophie de la praxis, est fondamentalement liée d'une part aux questions cruciales qui interpellent les gens, et d'autre part à la nécessité d'exercer une capacité critique contre la multiplication corrosive et soporifique à la fois des perceptions stéréotypées et des simulations critiques. Or le nouveau nom donné au laboratoire porte la lumière entièrement (presque cruellement) sur la question de la philosophie pratique enlevant toute distraction et tout effort de rendre cette question plus docile et généralement reconnaissable. En même temps l’approche de laboratoire, dans son sens plutôt deleuzien, dès le premier moment mise en avant comme par excellence liée à la compréhension de la philosophie pratique elle-même, intègre de plus en plus emphatiquement l’expérience praxéologique et l’expérimentation.
Un tel Laboratoire serait en fait un geste20 par excellence institutionnel et notamment philosophique de création à la périphérie insulaire et sur les frontières de l’Europe d’un centre de recherche, une installation donc ‘métaphorique’ de la philosophie, un essai d’événement21 ‘sur la pointe des pieds, sur la marge, une île et une brèche, un moment-mouvement22 … Serait-ce peut-être de l’herbe23 , ce petit pois sous les matelas ?
Du fond de la philosophie de l’éducation à son horizon
« C’est progressivement donc qu’il se crée une construction et une déconstruction incessantes des niveaux de sens concernant la philosophie de l’éducation, un effort et une lassitude par rapport à l'accomplissement de son sens, une géographie et une rythmologie24 sinistres, puisque l'espace de la philosophie de l'éducation semble ne pas être - ne pas être un effet, ne pas être un corps, ne pas être un instrument. Conceptions donc (de ce que la philosophie pourrait ou devrait être en philosophie et en éducation) converties en discours et définitions systématiques qui la concernent, élucidant son développement et son statut ; espaces de travail, d'expérience et de recherche qui l'intéressent et, à nouveau, la déterminent, théoriquement et pratiquement, sans l'épuiser ; lieux et cultures pour ses gestes, voyages, interventions, rôles ; concepts pour son laboratoire et ses pratiques : le spectre de la praxis de ses manifestations et de sa nécessité vécue »25 .
Il paraît que, pour exister, la philosophie de l’éducation doit constamment nier son ‘instrumentalisation’ découlant du fait qu’elle est considérée – au sein des communautés académiques- plutôt en tant que servant les buts des deux disciplines de référence la constituant (d’une manière dépendant de son rapport particulier à chaque fois avec la philosophie ou les sciences de l’éducation, une manière liée aux systèmes éducatifs dont elle fait partie). Par contre, pour qu’elle soit considérée comme un champ d’expérimentation continue, et pas un effet ou un instrument, sa plus haute vertu serait d’être le témoin de l'impératif interminable de continuer. Si l'inclusion hésitante ou agressive, légitimée ou non, de la philosophie dans la pédagogie et vice versa, est philosophiquement et pédagogiquement vertigineuse et ludique, le surplus ou le manque, ce qui s'inscrit volontairement à la marge serait-ce bien la philosophie de l'éducation ? Paradoxalement, alors que cette dernière s'institutionnalise comme discipline, elle doit aussi être constamment choisie comme geste (philosophique) par ceux qui veulent la pratiquer, choix qui la définit et l'établit, mais de manière acrobatique et généreuse. Il semble nécessaire qu'elle raconte à plusieurs reprises et avec insistance sa propre émergence et installation à travers l'histoire d'une décision d'exister en dehors de la philosophie et de la pédagogie, mais, étrangement, avec elles en elle (s), probablement en prêtant attention à « la simplicité, la rigidité et l'efficacité » (la philosophie des ” petits pas “, dans une sorte d’« ingénierie du coup par coup »26 ).
Si, par ailleurs, la philosophie de l'éducation est susceptible de développer une sensibilité pédagogique ou pratique particulière27 , cette sorte d'intensité praxéologique s'explique par le fait qu'elle est une discipline enracinée dans un lieu limbique mais étendu, traversé par de multiples rebonds et retournements du théorique dans le pratique et vice versa, capable de saisir à la fois des convergences et des ruptures - elle développe ainsi, par une réflexivité supplémentaire28 , un sens commun à double tranchant, soit comme perte ou falsification de la pensée critique, soit comme une certaine saisie du sens qui crée des communautés de sens29 – tenue entre la théorie et la pratique30 . Or, sa sensibilité correspondrait à sa capacité, d'une part, de saisir et de tenir le pratique dans le théorique et, d'autre part, de saisir et d'élaborer les fluctuations et les transfigurations du sens commun en pratiquant une attention perceptive et incontournable. Ainsi, ce qui identifie la philosophie, ce ne sont pas les règles d'un discours, mais la singularité d'un acte. C'est aussi de cette manière que la philosophie de l'éducation devrait dépasser le dualisme entre théorie et pratique comme un écart qui démantèle intrinsèquement sa propre cohérence. En effet, coincée entre l'expérience vivante et le discours désincarné, la pensée de la philosophie de l'éducation se trouve dans un mouvement incessant et intense, récalcitrant et obstiné d'attraction-répulsion vers une (im)possibilité de congruence entre théorie et pratique, vers une abstraction qui fuit. Ainsi, la philosophie de l'éducation, vue plutôt comme une philosophie du mouvement31 , incorpore, non seulement au niveau thématique mais aussi dans sa propre constitution, le paradoxe (ainsi que l'herméneutique de ce paradoxe) d'une défense de la stratégie réflexive et du geste problématologique contre les certitudes qu'une telle stratégie crée32 , contre la réduction du discours pratique à une raison instrumentale, un registre logocratique33 défendant la dichotomie entre théorie et pratique malgré les précautions kantiennes. Or la philosophie de l’éducation devient ici le seuil à la fois trébuchant et invitant afin de se faufiler à son intérieur et en même temps d’errer à son extérieur, ce qui nous permet de découvrir/dévoiler, pas à pas, la tension pratique, son noyau et ses espaces.
« Rideau complètement baissé. Salle dans l’obscurité. La voix continue inintelligible, derrière le rideau, dix secondes, faiblit et se tait en même temps que revient l’éclairage de la salle. Note : le geste consiste en une sorte de haussement des bras dans un mouvement fait de blâme et de pitié impuissante. Il faiblit à chaque répétition jusqu’à n’être plus, à la troisième, qu’à peine perceptible. Il y a juste assez de place pour le contenir le temps que BOUCHE se remet de son véhément refus de lâcher la troisième personne »34
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Samuel Beckett, 2010, 95
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Notes
- [←1 ]
Une caractéristique de cette nébulosité est aussi le fait que jusqu’à ce moment, la philosophie de l’éducation n’est introduite que dans les départements des Sciences de l’Éducation.
- [←2 ]
Il s’agit d’une expression de David Bridges, tirée de son discours d’ouverture (« Philosophie de l’Éducation : En construisant le Dialogue International ») de la Conférence européenne, « Comprendre la Philosophie de l’Éducation », organisée par moi-même dans le cadre du Département des Sciences de l’Éducation Préscolaire et de l’Ingénierie/ Université de l’Egée, à Rhodes, 9‐10 Novembre, 2003. C’était la première conférence en Grèce dédiée spécifiquement à la philosophie de l’éducation et mettant originalement l’accent sur la difficulté à saisir et cerner cette discipline, faisant d’elle une question philosophique. Parmi les membres du comité scientifique et les participants.es on trouve Michel Soëtard, Philippe Meirieu, Jean Houssaye, Anne-Marie Drouin-Hans, Jean-Louis Vieillard-Baron, Volker Kraft (Université de Νeubrandenburg), Bridges David (Université d’East Anglia), Colin Wringe (Université Keele), Paul Standishm Terence ΜcLaughlin, (London University)]. Pendant cette rencontre, des discussions sur la fondation d’une association de philosophie de l’éducation qui, initialement, serait francophone, ont également tenu lieu. Dans la foulée de ces événements particuliers et pour ainsi consolider leur portée (en combinaison avec la fondation du Réseau de Philosophie de l’Education en Praxis, v. infra, note. 22 ), deux volumes collectifs sur la Philosophie de l’Education ont été progressivement produits et traduits en grec – v. Théodoropoulou 2010 et 2014a - le deuxième volume signalant déjà la tournure vers le versant pratique de la philosophie de l’éducation, comme une tournure inhérente à cette dernière (v. infra)
- [←3 ]
Mais d’autre part, «in a certain sense there is no something like philosophy of education» (Frankena, 1971)
- [←4 ]
« Pour cela il faut transformer la pensée, ou l'expérience, ou le dire de l'expérience du possible ou de l'impossible » (Soussana, Nouss, Derrida, 2001, 100-101)
- [←5 ]
« A l’intérieur de ses limites, chaque discipline reconnaît des propositions vraies et fausses ; mais elle repousse, de l’autre côté de ses marges, toute une tératologie du savoir. L’extérieur d’une science est plus ou moins peuplé qu’on ne croit : bien sûr, il y a l’expérience immédiate, les thèmes imaginaires qui portent et reconduisent sans cesse des croyances sans mémoire ; mais peut-être n’y a-t-il pas d’erreurs au sens strict, car l’erreur ne peut surgir et être décidée qu’à l’intérieur d’une pratique définie ; en revanche, des monstres rôdent dont la forme change avec l’histoire du savoir. Bref, une proposition doit remplir de complexes et lourdes exigences pour pouvoir appartenir à l’ensemble d’une discipline ; avant de pouvoir être dite vraie ou fausse, elle doit être, comme dirait M. Canguilhem « dans le vrai ». (Foucault, 1971, 35-6)
- [←6 ]
Or les philosophes de l’éducation devraient formuler, brasser et confronter le «dilemme de la relevance», à l’égard de la philosophie ou de l’éducation et dilemme inévitable pour l’évolution de leur discipline (v. Higgins, 2001).
- [←7 ]
Cf. les philosophes de l’éducation en tant que «gens du milieu » (Worsfold, 2001).
- [←8 ]
Théodoropoulou, 2003, 2006, 2013a
- [←9 ]
On va supposer que « la personne que le/la philosophe est, ainsi que le concept de la personne forment un échafaudage pour la construction de sa pensée philosophique elle-même, un différend pour les aspects pluriels de celle-ci, au fur et à mesure qu’elle se forme en les traversant, comme on traverse laborieusement la végétation dense, haute et non maîtrisée qui nous sépare d’une certaine éclaircie /clairière ( Lichtung/ Waldlichtung : la référence heideggérienne étant double, à la fois à la lumière et au dévoilement (Erschlossenheit) ainsi qu’à l’ouverture de l’être, l’ouverture pour tout ce qui va être présent ou absent, un espace libre […] – soit la mer, soit le désert, soit la ville, soit la montagne, au-dedans et à cause de la lumière […] Le paradoxe de la pensée philosophique et de son exercice est que la personne revient aussi bien en tant qu’une pierre d’achoppement pour l’existence d’un sens-contrefort ou enveloppe, que comme un horizon intérieur de sens – plus que cela, elle ne peut que signaler le rapport intime entre le/la philosophe et sa philosophie, un exercice de haute intensité, complexité et subtilité à plusieurs niveaux […] » (Théodoropoulou, 2024a, 45-55)
- [←10 ]
v. le concept de « sprezzatura » chez Castiglione, à savoir un nouveau mot lié à la grâce (qui n'est pas de naissance), signale l’éloignement à tout prix de l'affectation “comme s'il s'agissait d'un récif rugueux et dangereux ». Sur cette base, « le véritable art est ce qui ne semble pas être de l'art» ( Castiglione, 198, 46, cité dans: Theodoropoulou, 2025, 6-7).
- [←11 ]
« […] le parfait courtisan doit éviter toute manière d’être ou d’agir de façon ostentatoire […] Or, si d’un côté l’affectation, notion d’origine rhétorique, indique un excès de zèle, voire ce qui excède le naturel, la «sprezzatura» est, de l’autre côté, son antonyme. L’«affectation» se situe dans la lignée de ce qui est le kakozèlon en grec et la mala affectatio en latin, voire la recherche excessive, l’effort trop manifeste, s’opposant ainsi à la virtus qui se trouve au milieu entre deux extrêmes. […] la «sprezzatura» se réfère à toute attitude visant au juste milieu, à l’équilibre exact, à la «médiocrité», entendue dans son sens originel […] de donner l’apparence de la spontanéité, de l’aisance, de la désinvolture, de cette facilité naturelle qui ne laisse entrevoir aucune impression d’effort » (Devincenzo 2008, 70-1)
- [←12 ]
- [←13 ]
Cf. la définition foucaldienne de la philosophie en relation avec le concept de l’événement: «[…] nous sommes traverses par des processus, des mouvements, des forces ; ces processus et ces forces, nous ne les connaissons pas, et le rôle du philosophe, c’est d’être sans doute le diagnosticien de ces forces, de diagnostiquer l’actualité» (Foucault, 1994, 573).
- [←14 ]
Penser n’est pas sortir de la caverne, ni remplacer l’incertitude des ombres par les contours tranchés des choses mêmes, la lueur vacillante d’une flamme par la lumière du vrai Soleil. C’est entrer dans le Labyrinthe, plus exactement faire être et apparaître un Labyrinthe alors que l’on aurait pu rester «étendu parmi les fleurs, faisant face au ciel » [Rilke, Immer wieder…]. C’est se perdre dans des galeries qui n’existent que parce que nous les creusons inlassablement, tourner en rond au fond d’une cul-de-sac dont l’accès s’est refermé derrière nos pas – jusqu’à ce que cette rotation ouvre, inexplicablement, des fissures praticables dans la paroi » (Castoriadis, 1978, 6)
- [←15 ]
v. sur cette base, l’organisation de la 1ère Rencontre Internationale suivie d’ateliers «Philosophie de l’Education en Praxis», en 2012 à Rhodes (avec la participation des membres du groupe fondateur du RePhedenPrax, v. infra, nt 22).
- [←16 ]
Pour plusieurs informations, v. le site du RePhedenPrax: https://practphilab.aegean.gr/nephedinprax/
- [←17 ]
Dans cette même phase, le Réseau, du fait de l’identité de son groupe fondateur (Didier Moreau, Alain Kerlan, Adalberto dias De Carvalho, Armando Zambrano Leal, Remi Hess, Gabrielle Weigand) s'était investi dans la francophonie, en essayant surtout de tracer la ligne de recherche associant la philosophie de l'éducation à la praxis, surtout à travers l'expérience académique.
- [←18 ]
Pour plusieurs informations, v. le site de la Biennale :
- [←19 ]
Tandis qu’en même temps, on passe à la deuxième phase du Réseau de la Philosophie de l’Education en Praxis (2018sq) pendant laquelle le Réseau choisit de mettre l'accent sur son expression interculturelle, qui correspond à celle de la philosophie même du Laboratoire au cours de son parcours depuis sa création, alors qu'il tente d’accueillir des langues différentes et de faire collaborer des cultures différentes. En même temps, les questions explorées au cours de la première phase évoluent à travers la formulation de la préoccupation nodale persistante sur le rôle que la philosophie de l'éducation peut jouer aujourd'hui, en combinaison avec la question fondamentale pour le Réseau, relative à sa dimension de praxis. Or cette accent sur l’interculturel traduit une volonté decomprendre la philosophie pratique aussi à travers son rapport significatif avec une philosophie interculturelle, ce qui apparaît aussi avec la création de la revue du réseau (Bolides, v. https://practphilab.aegean.gr/nephedinprax/journal-bolides/)
- [←20 ]
Des gestes qui peuvent être des perturbations ou des incursions, mais aussi des liens ou des passages, des entités interstitielles, mais de toute façon ils apparaissent avec une certaine discrétion et ils ont la qualité d'un événement d'avancement, d'une manœuvre, d'un virage » (Theodoropoulou, 263). « Le ton désigne la qualité, l'intensité d'une observation, spécifie les détails des mouvements et des caractères du geste, leur degré d'intensité, la manière dont le monde du projet se déploie en créant une sensation générale à son sujet. Il indique également une étape parmi d'autres dans le processus, une disposition particulière, il désigne un certain choix de techniques et de moyens, et en fait, pour toutes ces raisons, il dirige l'attention sur le point précis, mais après tout caché, d'une caractéristique spécifique du projet, en révélant ainsi une position cruciale pour sa compréhension. Il fonctionne comme un clin d'œil inattendu, un hochement de tête qui ouvre la voie, fournit des outils pour continuer, un sentiment de certitude technique, de particularisation et en même temps la création d'une atmosphère, nécessaire pour que le projet puisse avancer. Le ton est un battement, une nuance, un soupçon, une remarque qui ouvre une voie de compréhension. Il aiguise les mouvements et donne aux gestes leur netteté, leur acuité ou même leur brutalité » (ibid.).
- [←21 ]
« Entre les cris de la douleur physique et les chants de la souffrance métaphysique, comment tracer son mince chemin stoïcien, qui consiste à être digne de ce qui arrive, à dégager quelque chose de gai et d'amoureux dans ce qui arrive, une lueur, une rencontre, un événement, une vitesse, un devenir? (Deleuze, Parnet, 80)
- [←22 ]
Les mouvements cachent une tendance à la décision, une propension intensive à l'essai, une volonté d'ouverture et d'inauguration - ils ouvrent de nouveaux cadres spatio-temporels pour les activités de recherche, ils manifestent un courant de pensée (un « vent de pensée ») - les mouvements du corps et l'émergence de mouvements (gestes) - désignent, des changements de direction, des déplacements vers une autre situation, un autre lieu, une autre pensée, une autre position, un autre choix. Les mouvements imprègnent également ce projet de la philosophie de l'éducation, le soutiennent, créent des vagues et la nécessité d'une suite, ils provoquent des effets de désambiguïsation et des remises en cause du sens. Cependant, s'ils orientent les développements exploratoires vers des intérêts particuliers, ils n'excluent pas les déviations, ne préfigurent pas et n'imposent pas des itinéraires et des conclusions.
- [←23 ]
« […] Le recommencement français, c’est la table rase, la recherche d’une première certitude comme d’un point d’origine, toujours le point ferme. L’autre manière de recommencer, au contraire, c’est reprendre la ligne interrompue, ajouter un segment à la ligne brisée, la faire passer entre deux rochers, dans un étroit défilé, ou par-dessus le vide, là où elle s’était arrêtée. Ce n’est jamais le début ni la fin qui sont intéressants, le début et la fin sont des points. L’intéressant, c’est le milieu. Le zéro anglais est toujours au milieu. Les étranglements sont toujours au milieu. On est au milieu d’une ligne, et c’est la situation la plus inconfortable. On recommence par le milieu. Les Français pensent trop en termes d’arbre : l’arbre du savoir, les points d’arborescence, l’alpha et l’oméga, les racines et le sommet. C’est le contraire de l’herbe. Non seulement l’herbe pousse au milieu des choses, mais elle pousse elle-même par le milieu. C’est le problème anglais, ou américain. L’herbe a sa ligne de fuite, et pas d’enracinement. On a de l’herbe dans la tête, et pas un arbre : ce que signifie penser, ce qu’est le cerveau, «un certain nervous system», de l’herbe » ( Deleuze, 1996, 50-1)
- [←24 ]
Cf. la manière dont Henry Lefebvre perçoit, à travers ses œuvres, le rythme comme un component praxial en proposant le développement d’une analyse qui découvrira les rythmes d’une oeuvre (rythmanalyse) incluant le corps, l’espace et les pratiques sociales (Lefebvre, 1992).
- [←25 ]
Theodoropoulou, 2025, p. 27
- [←26 ]
Popper, 1957, 66-7.
- [←27 ]
Cf. « La raison elle-même est un recevoir. Autre façon de dire, si l'on veut parler encore sous la loi de la tradition, mais contre elle, contre les oppositions léguées, que la raison est sensibilité. » (Derrida, 1997, 56).
- [←28 ]
Blais, Gauchet, Ottavi, 2002.
- [←29 ]
Wittgenstein reconnaît aux ressemblances variées « à grande et à petite échelle » entre les membres d’une famille (dites « d’“air de famille”) « un réseau complexe de ressemblances qui se chevauchent et s’entrecroisent »: « […] de la même façon que nous enroulons, dans le filage, une fibre sur une autre. Or la solidité du fil ne tient pas à ce qu’une certaine fibre court sur toute sa longueur, mais à ce que de nombreuses fibres se chevauchent […] » (Wittgenstein, 2014 & 66- 67, 57-58
- [←30 ]
Pensant à cet intervalle on reste, paraît-il, suspendu «Quelque part dans l’inachevé” (v. Jankélévitch, Berlowitz, 1978, 107) selon la position du philosophe que “la condition de l’homme dans sa modernité, c’est la dissonance » (ibid. 118-9)
- [←31 ]
v. Théodoropoulou, 2013b
- [←32 ]
« Ainsi, le concept de problématisation, dans la mesure où il peut être considéré comme un mécanisme de création ou de gestion de la rupture, semble être focalement lié non seulement à la reconstruction du connu (précisément à travers sa problématisation), mais aussi au concept de l'imprévisible, si la problématisation est exactement conçue comme un double mécanisme. D'une part, elle apparaît comme un mécanisme d'ouverture ou de réduction à l'imprévisible (c'est-à-dire si elle permet ou déclenche l'émergence de nouvelles ruptures, de nouvelles potentialités, de nouvelles questions, en posant méthodiquement les conditions du problème et en dépassant les limites de la simple prise de conscience « troublant » le savoir acquis, comme elle ratisse et réfute ses profanations). D'autre part, elle fonctionne comme un mécanisme de prédiction, d'identification, d'appropriation, et plus généralement d'atténuation de l'imprévisible [...] » (Theodoropoulou, 2014b, 137).
- [←33 ]
Les caractéristiques de la Raison qui est indispensable dans la technique moderne de la guerre (comme elle l’était dans le champ des affaires) « can be summarized as the optimum adaptation of means to ends, thinking as an energy-conserving operation. It is a pragmatic instrument oriented to expediency, cold and sober» (Horkheimer, 1941, 368).
- [←34 ]
« The Mouth's refusal to relinquish the third person is thus essentially a refusal to see herself for what she really is. As Beckett commented in an interview with John Gruen: "Somewhere [man] must know that self-perception is the most frightening of all human observations. He must know that when man faces himself, he is looking into the abyss" » ("Samuel Beckett talks about Beckett," Vogue (December 1969), 210, cité dans: Zeifman, 1976, 42)
Annuel de la recherche en philosophie de l’éducation ISSN 2779-5292
Sofphied